Finalement, elle a aussi pris la robe imprimée. Mais il ne restait que du 38. Le chemisier, le pull col en V et la jupe, elle les avait choisis en 40, sa taille. « D’ici à l’été, ça devrait aller ! C’est la première fois que je viens et vu le prix, je ne vais pas faire la difficile… », glisse-t-elle en s’insinuant dans la file qui mène à la caisse, les quatre articles pliés sur son bras gauche, comme un garçon de café le ferait du liteau réglementaire. Prévoir un peu d’attente. Car Pascale (certains interlocuteurs ont requis l’anonymat), 43 ans, mère de famille, agent territorial, n’était pas seule à fouiller dans les portants.
Ce 13 janvier-là, le magasin Noz de Niort organisait une nocturne exceptionnelle, et ça valait le détour. Rendez-vous jusqu’à 21 heures, sous la halle de béton brutaliste de l’avenue de La Rochelle, où « l’as des lots » procédait au « déstockage final de la collection Camaïeu », acquise aux enchères après liquidation judiciaire. Prix massacrés : moins 50 %. Succès fou. Parking complet.
A l’autre bout du bâtiment, Jean-Pierre, 47 ans, conducteur d’engins, fidèle au lieu depuis peu, flanqué de ses deux adolescentes, a pioché allègrement dans les bacs et les rayonnages parmi les « fins de série », les « seconds choix », les « dates courtes » et les « changements packaging ». Même pas déconcentré par le manège d’une mascotte au profil d’ours, qui fait l’âne dans les travées. Résultat des courses : un quartette de bières parisiennes (brassées en banlieue), un pack de cola international, un sirop d’orgeat artisanal venu d’Anjou, trois boîtes de gâteaux napolitains, une mini table de ping-pong (raquettes et balles fournies) sans origine connue et 600 ml d’un bain de bouche nord-américain total care dont la couleur mauve – limite fluo – évoque à la fois la rigueur hygiéniste texane et les premiers âges du psychédélisme californien. « Même pas vingt euros, calcule Jean-Pierre. C’est cool, le discount ! » Et rentable.
En France, fin 2022, la part de marché des enseignes de hard discount (Lidl, Aldi, Netto) atteignait 11,5 % (9 % en 2019, chiffres Kantar). En hausse constante, périodes de confinement mises à part. Les déstockeurs (Action, Noz, Max Plus, GiFi, Maxi Bazar, etc.), spécialistes des produits du quotidien (hygiène, entretien, confiserie, décoration, bricolage), dépassaient, eux, les 11 milliards d’euros de chiffres d’affaires (estimation LSA). Croissance à deux chiffres, dopée par les performances d’Action (un milliard d’euros en 2017, 3 milliards en 2022).
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