Le 19 octobre 2018, l’Autorité des marchés financiers (AMF) avait lancé une enquête sur l’information financière de Casino et Rallye, sa maison mère. Lundi 11 septembre, la commission des sanctions – l’autorité judiciaire du gendarme boursier – a prononcé son verdict : elle a infligé une amende 25 millions d’euros à Rallye « pour avoir diffusé des informations fausses ou trompeuses susceptibles de fixer le cours du titre Rallye à un niveau anormal ou artificiel ».
Une somme record pour un émetteur, mais sans grande conséquence pour la holding, qui a mal vieilli en cinq ans : la clé de voûte de l’édifice permettant à Jean-Charles Naouri d’assurer sa mainmise sur Casino (Monoprix, Franprix, Géant, Cdiscount) est, en effet, virtuellement en liquidation.
L’accord de principe signé le 27 juillet entre Casino, ses créanciers et les repreneurs – Daniel Kretinsky (actionnaire indirect du Monde), Fimalac (la holding de Marc Ladreit de Lacharrière) et le fonds britannique Attestor – va entraîner une dilution massive du capital du distributeur, réduisant à la portion congrue la participation de 52,3 % détenue par Rallye. Alors que la dette financière nette de la holding s’élève à près de 3,2 milliards d’euros, les créanciers vont tout perdre.
Spéculations à la baisse
Si M. Naouri est l’actionnaire principal de Rallye, il n’en est plus le dirigeant exécutif (contrairement à Casino). En 2013, il s’est replié sur la présidence. Il reste toutefois la figure de proue de la maison. Longtemps, sa photo a orné le rapport annuel de Rallye, introduit par un rituel « message du président ». Signe des temps difficiles ? Son portrait a été escamoté à partir de l’opus 2020, le « message du président » disparaissant dans celui de 2022. Dans l’ombre du grand homme, Franck Hattab, discret directeur général de Rallye depuis avril 2017, porte la responsabilité de la communication financière.
A ce titre, il s’est vu infliger par la commission des sanctions une amende de 1 million d’euros. Le 7 juillet, lors de la séance publique, une sanction de 2,5 millions d’euros avait été requise. Des montants importants pour un dirigeant, mais M. Naouri est réputé bien rémunérer ses collaborateurs. Entre 2017 et son départ, en septembre 2022, pour une autre société de la galaxie Naouri – avant de reprendre ses fonctions en 2023 –, M. Hattab a empoché un total de 7,2 millions d’euros.
Que reproche l’AMF à Rallye et à son directeur général ? D’avoir émis quatorze communications, entre le 8 mars 2018 et le 15 mai 2019, affirmant que la « situation de liquidité » de la holding était « solide », voire « très solide ». Rallye se targuait de bénéficier de « plus de 1,7 milliard d’euros de lignes de crédit confirmées, souscrites auprès d’une vingtaine de banques différentes. Au 31 décembre 2017, aucune ligne n’est utilisée », selon le rapport annuel 2017, publié le 14 mars 2018. En réalité, note l’AMF, plus de 400 millions d’euros de ces lignes n’étaient pas disponibles, compte tenu de l’évolution des titres Rallye et Casino.
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