« La grande distribution est une cible facile, visible et de bonne volonté quand il s’agit de baisser les prix »

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En osier, en jonc, voire en palmier, le panier a accompagné la vie des femmes et des hommes pour accueillir les récoltes du potager ou le produit des courses. Passé de mode au profit du chariot ou du cabas, il reste un symbole politique. Le gouvernement entend imposer aux grands épiciers un « panier anti-inflation ». L’osier tressé au secours des grands déséquilibres macroéconomiques. Ce lundi 6 mars, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a annoncé un accord avec la grande distribution. Habituelle manœuvre destinée à pousser les commerçants à faire un geste… et à montrer que le gouvernement en est à l’origine.

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Dimanche 5 mars, Alexandre Bompard, PDG de Carrefour, bon élève, avait déjà ouvert son panier personnel. Celui-ci contient des shampooings, des dentifrices, des légumes, des pâtes, des œufs et même de la pâte à tartiner. Au total, deux cents produits à 2 euros, prix garanti jusqu’en juin. Il avait été précédé quelques jours plus tôt par Dominique Schelcher, le patron de Système U. Intermarché s’est également lancé dans la guerre des paniers. Magie de la concurrence, tous rivalisent de produits à prix coûtant pour protéger les maigres économies de leurs clients les plus précaires, principales victimes de la hausse des prix.

La grande distribution est une cible facile, visible et de bonne volonté quand il s’agit de baisser les prix. C’est son métier. Elle est depuis près d’un demi-siècle l’allié objectif du gouvernement pour doper la consommation des Français. De plus, cinq acteurs bien identifiés, dont trois groupements d’indépendants, dominent le marché. Il est donc aisé de les pointer du doigt, en leur demandant de « faire un effort sur leurs marges ».

Arbitrage

Ce faisant, cette affaire masque un paradoxe et une ambiguïté. Le paradoxe est celui d’une accélération de l’inflation alors que les prix des matières premières, le blé, le pétrole, l’huile, l’acier, le transport ont plongé, souvent au-delà de 20 %. Dans l’alimentaire, la hausse est pourtant de 14,5 % en février, pour une inflation globale à 6,2 %.

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Où est passée la différence ? Pas vraiment dans la poche des distributeurs, suspectés régulièrement d’étrangler leurs fournisseurs, mais dans celle des grandes entreprises, dont les résultats sont excellents (L’Oréal, Unilever, Coca, Nestlé…), et dans celle des agriculteurs, comme le révélait une récente enquête de l’inspection générale des finances. Ce qui repose à nouveau l’éternelle question de l’arbitrage entre le portefeuille du consommateur et celui du producteur, grand ou petit. La France a choisi le premier. On ne peut pas tout mettre dans le même panier.

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