La Cour de cassation taxe un don manuel découvert à l’occasion d’un contrôle fiscal

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Faire un « don manuel » consiste à remettre de la main à la main certains biens : bijoux, tableaux, meubles, argent… Il n’existe curieusement aucune obligation pour le bénéficiaire, ou « donataire », de « révéler » le don, qui plus est dans un certain délai, à l’administration fiscale, alors que sa taxation génère des droits, donc des recettes pour l’Etat.

Mais s’il le révèle – parce qu’il y a intérêt, pour des raisons familiales notamment –, il doit acquitter des droits dans un délai d’un mois. Et si le don est découvert lors d’un contrôle fiscal, que se passe-t-il ? Telle est la question que pose l’affaire suivante.

En 2011 et 2012, Mme X reçoit deux dons manuels, d’une valeur totale de 1,3 million d’euros, qu’elle tait. Le 9 septembre 2014, l’administration l’informe que sa famille va faire l’objet d’un contrôle fiscal pour la période concernée. Le 13 novembre 2014, lors d’un premier entretien avec le vérificateur, Mme X « révèle » ses dons, qui, explique-t-elle, proviennent de son « père biologique », installé à l’étranger.

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Elle demande à acquitter les droits non pas dans le délai habituel, mais dans un « délai d’un mois qui suit la mort du donateur », comme l’y autorise une règle spéciale du code général des impôts (art. 635 A). L’administration le lui refuse, en considérant que cette règle ne vaut que lorsque la révélation a été « spontanée », et non lorsqu’elle est, comme dans son cas, « la conséquence d’une réponse à une demande de l’administration ou d’une procédure de contrôle fiscal ».

Changement de jurisprudence

Mme X saisit la justice, et obtient gain de cause, en appel : la cour de Versailles juge, le 28 janvier 2020, que la révélation a eu lieu « avant le commencement de l’examen » de sa situation. L’administration se pourvoit en cassation. Elle soutient que « la remise, par le contribuable, de ses comptes bancaires », qui a lieu lors du premier entretien d’un contrôle, n’est pas une révélation spontanée. La Cour lui donne raison, le 25 janvier (2023, 20-16.700), et condamne Mme X à payer 920 000 euros (60 % de droits pour don entre « non-parents », majoration pour déclaration tardive, et intérêts de retard).

On aurait aimé comprendre en quoi cet aveu, non spontané, équivaut à une révélation, entraînant taxation, alors que, de 2013 à 2016, la Cour a jugé que la découverte de dons manuels, « dans le cadre d’une vérification de comptabilité, ne peut constituer une révélation », et que ces dons ne sauraient être taxables (12-11.642, 12-17.414, 15-19.966).

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