Au tournant des années 2000, la Grande-Bretagne rayonnait par son attractivité. Capitaux et investissements affluaient du monde entier. En comparaison, la France, pays des grèves, des 35 heures et des envolées souverainistes, faisait grise mine. Des sujets de Sa Majesté, férus de tennis, avaient théorisé cela par un slogan-choc : « Qu’importe la nationalité du vainqueur de Wimbledon, pourvu que cela se passe à Wimbledon. » La géographie l’emporte sur la nationalité. Serait-on en train d’assister à un effet Roland-Garros ?
L’extrême difficulté des Français à gagner leur propre tournoi de tennis est un point commun avec les Britanniques. Ce n’est pas le seul. Comme le souligne le savoureux chroniqueur du Financial Times, Simon Kuper (d’ailleurs exilé en France), Britanniques et Français sont des jumeaux qui ne veulent pas le reconnaître, « deux nations de 67 millions d’habitants absurdement surcentralisées, luttant perpétuellement contre la désindustrialisation, où le passé obscurcit le présent comme un voile ».
Aujourd’hui, la France est la Grande-Bretagne des années 2000. Elle domine le classement européen des investissements étrangers, comme en témoigne une fois de plus l’annonce d’une nouvelle usine de batteries à Dunkerque (Nord), par l’entreprise taïwanaise ProLogium, avec près de trois mille emplois promis. Une excellente nouvelle pour les Hauts-de-France, champions français de l’attractivité.
Des bénéfices qui repartent
Cette réindustrialisation que l’on constate depuis plusieurs années va singulièrement renforcer le tissu français, notamment son industrie automobile. Cette dernière avait été le principal acteur de la fuite des emplois durant les années 2000, en délocalisant massivement la production de ses petites voitures dans les pays de l’Est et en Turquie. De plus, comme la batterie représente 40 % de la valeur d’une voiture électrique et qu’elle est un quasi-monopole asiatique, autant que les premiers classés mondiaux viennent jouer au pays de Roland Garros.
Mais, comme l’expérience britannique nous l’a rappelé, la capacité de séduction est un art éphémère et ne peut être la seule réponse au souhait de long terme de voir revenir son industrie, et ce pour au moins trois raisons. D’abord, parce que si les investissements entrent, les bénéfices repartent, eux, vers le siège de l’entreprise, à Taipei, Pékin ou New York. Ensuite, les activités de plus haute valeur ajoutée, comme la recherche, sont celles qui sont le moins décentralisées. Enfin, les centres de décision n’étant pas locaux, les arbitrages de fermeture en cas de difficulté sont bien souvent défavorables.
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