Crédit d’impôt, bonus automobile, formation… Lors d’un discours à l’Elysée en présence des acteurs du secteur, Emmanuel Macron a présenté sa stratégie pour accélérer la réindustrialisation de la France. Le projet de loi, porté depuis janvier par le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, avec le concours de parlementaires et de chefs d’entreprise, et dont les grandes orientations avaient déjà été dévoilées au début d’avril, sera présenté en conseil des ministres mardi 16 mai.
Le chef de l’Etat a notamment fait part de son intention de « réformer les critères d’attribution des bonus automobiles » pour les voitures les moins polluantes, « pour mieux prendre en compte l’empreinte carbone de la production du véhicule », ce qui va conduire à « soutenir les batteries et les véhicules produits en Europe ». Se défendant de tout « protectionnisme », le chef de l’Etat a vu dans cette mesure une manière de « ne pas utiliser l’argent du contribuable français pour accélérer l’industrialisation non européenne ».
Même logique pour les commandes publiques, qui vont prendre en compte les critères environnementaux « pour les produits clés de la décarbonation », comme les éoliennes et les pompes à chaleur, dès juillet 2024 au lieu de courant 2026.
Par ailleurs, un nouveau « crédit d’impôt industrie verte » va être instauré pour soutenir la production de batteries, pompes à chaleur, éoliennes ou panneaux solaires, a annoncé M. Macron. Ce crédit d’impôt, qui fera partie du projet de loi « industrie verte », « permettra de déclencher 20 milliards d’investissements sur le territoire national d’ici à 2030 », selon lui.
Réduire les délais de mise en œuvre des projets
Parmi les autres annonces du chef de l’Etat, une enveloppe de 700 millions d’euros pour installer les formations au plus près des étudiants, notamment dans les plus petites villes et dans les « métiers en tension ». « 700 millions d’euros seront engagés dès les prochains jours et dans l’année à venir pour faire évoluer la carte des formations à tous les niveaux de diplôme », a-t-il dit. Remarquant un déficit de connaissance des métiers de l’industrie, le chef de l’Etat a aussi dit vouloir augmenter les échanges entre entreprises et collégiens, car aujourd’hui « le stage de 3e ne suffit pas ».
Le président a aussi annoncé son intention, au moyen de la loi « industrie verte », de réduire drastiquement les délais de mise en œuvre des projets industriels. Il a dit vouloir « garantir » qu’il ne s’écoule pas plus de neuf mois entre une décision d’implantation et le début des travaux, soit un délai deux fois inférieur à celui constaté aujourd’hui, selon lui. « On peut proposer beaucoup de milliards à des industriels ; si on met trois ou quatre ans à les déployer, on est déjà en retard », a-t-il jugé.
Pour cela, alors que le foncier industriel est rare, la banque des territoires va investir un milliard d’euros pour « dépolluer » des friches existantes et les rendre « prêtes à l’emploi » pour de futurs nouveaux projets. Au passage, le président espère par ces mesures réduire les « recours abusifs » qui « créent du découragement ».
Appel à une « pause » sur les règles environnementales
Pour préserver les marges de manœuvre en matière industrielle, Emmanuel Macron a appelé à « une pause réglementaire européenne » sur les contraintes environnementales, estimant que l’Union européenne avait fait « plus que tous les voisins » et qu’elle avait désormais « besoin de stabilité ». En la matière, « on est devant les Américains, les Chinois ou toute autre puissance au monde », a-t-il estimé, ajoutant qu’il « ne faut pas qu’on fasse de nouveaux changements de règles, parce qu’on va perdre tous les acteurs ».
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Dans ce discours souvent technique, le chef de l’Etat ne s’est pas interdit un passage plus politique pour soutenir une fois de plus sa réforme des retraites. « Si la France s’est désindustrialisée, avec une faiblesse par rapport au voisin et dix points de PIB par habitant d’écart avec l’Allemagne, c’est que nous travaillons moins que nos voisins », a-t-il dit. Et d’ajouter : « Qu’a besoin de faire notre pays ? De continuer d’être compétitif sur le capital, le travail, l’innovation, (…) et d’augmenter la quantité de travail, et c’est dans cette stratégie que s’inscrit la réforme des retraites. »
Le chef de l’Etat doit se rendre dans le Nord vendredi pour visiter l’usine Aluminium Dunkerque, « le plus gros producteur d’aluminium primaire d’Europe » selon l’Elysée. Il doit aussi « officialiser de nouveaux investissements » – dont l’implantation par le groupe taïwanais ProLogium d’une quatrième usine de batteries pour véhicules électriques en France, pour une entrée en production à partir de la fin de 2026.