Christophe Morel est chef économiste de Groupama Asset Management, la filiale de l’assureur du même nom, qui a été primée par Fundclass au titre de meilleur gérant français dans la catégorie 41 à 70 fonds.
Le contexte économique actuel est-il porteur ?
Au début de l’année 2023, les industries des pays développés sont entrées en récession. Mais, paradoxalement, nous constatons aussi une incroyable résilience du marché du travail. Une boucle prix-salaires s’est mise en place. Le choc que nous avons connu sur les prix de l’énergie a conduit pour les entreprises à des hausses de coûts qu’elles ont répercutées sur leurs prix de vente.
Par ailleurs, les salaires ont augmenté, y compris en Europe. Plus globalement, il existe une forte tension dans tous les pays sur le marché du travail, avec des pénuries dans tous les secteurs : l’industrie, la construction, les services… Sur les salaires à l’embauche, la croissance est ainsi de l’ordre de 5 % sur un an en Europe.
En outre, avec le vieillissement démographique, nous entrons dans une ère de plein-emploi. C’est pourquoi nous ne croyons pas à une récession durable dont l’économie mettrait plusieurs années à se remettre, mais plutôt à une pause cyclique, de l’ordre de six mois.
Quelle peut être la réaction des banques centrales ?
Les banques centrales vont continuer de remonter les taux d’intérêt. Nous anticipons d’ailleurs que ce mouvement ira au-delà de ce que les marchés attendent. C’est la situation de l’emploi qui va donner le tempo aux banques centrales, davantage que les chiffres de hausse des prix. Nous ne craignons pas un dérapage de l’inflation, qui sera maîtrisée par les banques centrales.
En revanche, nous assistons actuellement à un bras de fer entre, d’un côté, les marchés, qui souhaitent que l’on retrouve au plus vite le monde d’avant, marqué par des liquidités abondantes et des taux très bas, et, de l’autre, les institutionnels (Etats, banques centrales…), qui comprennent que nous sommes dans un monde en transition, et que cela implique une normalisation monétaire et de l’inflation. C’est un changement de paradigme dont tout le monde n’a pas encore pris conscience, et un ajustement des marchés est nécessaire.
Entrons-nous dans une nouvelle ère ?
En toile de fond de ces phénomènes, nous connaissons un nouveau cycle d’investissement, ce qui est très sain. Les statistiques montrent bien qu’il se passe quelque chose : le taux d’investissement retrouve ses plus hauts niveaux dans tous les pays développés. Ce sont les Etats qui donnent l’impulsion, car ils ont décidé de s’atteler à la transition environnementale et à la transition géopolitique.
Il vous reste 16.42% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.