A la Jurassienne de céramique française : « Ce n’est pas le moment de flancher ! »

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« On ne doit pas être nombreux à avoir racheté une entreprise très énergivore en pleine crise énergétique ! », philosophe Manuel Rodriguez, PDG du groupe Kramer, une PME française jusqu’ici spécialisée dans la robinetterie. En juin 2021, il annonçait le rachat de l’usine historique de sanitaires en céramique Jacob Delafon de Damparis (Jura), mise en vente par l’américain Kohler. Ce dernier emportait avec lui la célèbre marque, mais ce savoir-faire rare et une partie des emplois étaient sauvés.

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Le temps de boucler la vente et le montage financier avec le soutien de l’Etat et de la région, les derniers actes n’étaient finalement signés que six mois plus tard. Le 9 décembre 2021, préfet, commissaire régional à la restructuration, député et présidente de région se pressaient à l’inauguration du site, rebaptisé la Jurassienne de céramique française (JCF).

Mais ces mois perdus ont coûté cher à cette usine, dont les pièces doivent cuire à 1 200 °C. « Dans une autre usine du groupe, on a bouclé, en juillet 2021, notre contrat de gaz pour trois ans à un prix très raisonnable. Si on avait négocié pour la JCF à ce moment-là, on aurait été en dessous de vingt euros le mégawatt-heure. On n’aurait pas eu tous ces soucis », regrette M. Rodriguez.

« On met l’usine en PLS »

Quand la vente est signée, en décembre, le prix du mégawatt-heure oscille déjà entre 80 et 90 euros. « On ne comptait redémarrer vraiment qu’en mars [2022], donc on se dit que ça va redescendre. Evidemment, on n’imaginait pas que l’invasion russe interviendrait pile à ce moment-là. Fin février, les prix passent à 280 euros le mégawatt-heure. C’est dix fois plus que le prix des vingt dernières années ! »

La guerre en Ukraine débute le jeudi 24 février 2022. Le lundi suivant, la décision est prise. « On met l’usine en PLS », déclare le PDG, en référence geste de premier secours, la « position latérale de sécurité ».

L’usine est mise en sommeil, la plupart des 54 salariés déjà réembauchés basculent en chômage partiel. « Sinon, on partait sur des dépenses de 4 millions d’euros par an, dix fois le budget qu’on s’était alloué. Il n’était même pas question de renégocier nos prix pour répercuter les hausses. A ce niveau, c’était impossible », poursuit le PDG.

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D’autant que, faute de factures à présenter sur l’année 2021 − c’était avant le rachat, l’entreprise était à l’arrêt −, la JCF ne peut percevoir les aides spécifiques de l’Etat aux entreprises touchées par la flambée des prix de l’énergie. Ce cas particulier n’a pas été envisagé.

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