Ces dernières années, une grappe de producteurs maraîchers bio s’est déployée sur les terres inondables mais fertiles du quartier Blois Vienne, en bord de Loire. Avec chacun leurs propres débouchés et, aujourd’hui, de fortes déconvenues. « L’hiver, c’est un temps pour se reposer. Mais là, c’est impossible. Je viens d’être placé en redressement judiciaire et mon cerveau fonctionne à 2 000 à l’heure pour trouver des solutions », souligne Ary Régent, trois enfants et bientôt 50 ans, qui se définit comme un paysan légumier.
En 2018, au moment de se lancer, il avait tout misé sur la fourniture de paniers de légumes de saison aux salariés des entreprises peuplant la zone d’activité de Blois. Sans engagement et personnalisables. Mais avec la crise due au Covid-19 et l’inflation, sa clientèle s’est évaporée : « Mes clients aiment le télétravail et ne retournent au bureau que deux jours par semaine. » Ary joue son va-tout dans la création d’une association pour le maintien de l’agriculture paysanne, qui manque étonnamment à Blois. « Pour m’en sortir, il me faudrait 200 paniers par semaine et 100 000 euros de chiffres d’affaires. Je veux y croire », lance-t-il.
De l’autre côté de l’église évangélique « Vie et Lumière », fréquentée par les gens du voyage, s’étalent les serres étincelantes des Jardins de Cocagne. Un panneau « Vente directe, 3 salades pour 2 euros » attire l’œil. La ferme emploie 50 personnes en réinsertion. C’est l’une des plus grosses exploitations maraîchères bio de la région, spécialisée elle aussi dans la vente directe. « On a 550 abonnés dans le Loir-et-Cher, un chiffre stable, et on s’estime vraiment chanceux », commente Nina Arnould, codirectrice.
« Le marché des restaurateurs et des magasins se contracte »
Cependant, le gros de sa clientèle se trouve plus loin, à Paris et Orléans. « En 2021, on était à 2 500 paniers par semaine. En ce moment, c’est 1 350, observe-t-elle. Pour les cinq Jardins de Cocagne de la région, la vente de légumes aux particuliers a chuté de 30 % en moyenne. » Mme Arnould réfléchit à de nouveaux débouchés. « Mais lesquels ? Le marché des restaurateurs et des magasins, par exemple, se contracte aussi. » Reste l’aide alimentaire, destinée aux épiceries solidaires ou au Secours populaire, et vendue au prix de gros. Elle bat son plein, mais ne suffit pas.
Ce mardi après-midi, Anne-Sophie Castets, pommettes roses et yeux rieurs, accueille six jeunes du lycée horticole de Blois, dans le cadre de leurs travaux pratiques. C’est une part de l’activité des « Fourmis vertes », une ferme qu’elle tient depuis 2013, avec Brigitte son épouse. Sa production maraîchère se destine principalement aux supermarchés Biocoop, ceux de Blois et de Vineuil, mais aussi à d’autres au nord de la région parisienne.
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