mardi, mai 21
Le journaliste tunisien Mohamed Boughalleb, à Tunis, en septembre 2022.

Un tribunal tunisien a condamné à six mois de prison ferme, mercredi 17 avril, le journaliste Mohamed Boughalleb, critique virulent du président Kaïs Saïed, arrêté il y a près d’un mois après une plainte en diffamation d’une fonctionnaire, a appris l’Agence France-Presse auprès de son frère et avocat, Mounir Boughalleb.

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Le journaliste, figure connue de l’audiovisuel, avait été arrêté le 22 mars après que la plaignante, une cheffe de service au sein du ministère des affaires religieuses, l’avait accusé d’avoir « porté atteinte à son honneur et sa réputation » sur les réseaux sociaux et dans des médias. Dans une publication sur sa page Facebook et à l’antenne d’une radio privée, M. Boughalleb avait demandé des explications sur l’intérêt de déplacements de cette responsable à l’étranger avec le ministre des affaires religieuses. M. Boughalleb avait dénoncé une forme de « corruption et de gaspillage de l’argent public ».

Alors qu’il était absent pour raisons de santé lors d’une première audience la semaine dernière, le journaliste, qui souffre de diabète et de problèmes cardiaques, s’est présenté mercredi devant le juge. Pour l’un de ses avocats, Jalel Hammami, « Mohamed Boughalleb paye pour avoir exercé sa liberté d’expression. Ce qui lui arrive est une honte ». En le poursuivant, « le procureur général a appliqué des instructions politiques », renchérit un autre membre de son comité de défense, l’avocat et ancien ministre Mohamed Abbou.

Une vingtaine de journalistes poursuivis

Pour Zied Dabbar, le président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), « cette affaire n’est qu’une nouvelle tentative destinée à intimider les journalistes et à les faire taire en instrumentalisant l’appareil de l’Etat ».

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« La mise en détention de Mohamed Boughalleb est inquiétante. Elle confirme que les autorités tunisiennes n’acceptent plus que les journalistes fassent leur travail et soulèvent des questions légitimes sur l’utilisation des deniers publics par les responsables politiques », déplore Khaled Drareni, représentant de l’organisation Reporters sans frontières (RSF) en Afrique du Nord. Dénonçant une « terrible régression de la liberté de la presse », M. Drareni estime que « la tendance à recourir à l’emprisonnement est une menace clairement adressée à ceux qui assument pleinement leur rôle de journalistes ».

M. Boughalleb est connu pour ses critiques de la classe politique et du président Saïed, ainsi que pour son travail d’investigation dans des affaires de corruption. Selon le SNJT, une vingtaine de journalistes font actuellement l’objet de poursuites judiciaires. Des ONG locales et internationales ont mis en garde contre un recul des libertés en Tunisie depuis que le président Saïed s’est arrogé les pleins pouvoirs, le 25 juillet 2021.

Le Monde avec AFP

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