mardi, mai 21
Le milliardaire Bidzina Ivanichvili, chef du parti Rêve géorgien, salue les manifestants lors d’un rassemblement en faveur de la « loi russe » à Tbilissi, le lundi 29 avril 2024.

Ses apparitions publiques sont rares. Très discret, l’oligarque milliardaire et ex-premier ministre Bidzina Ivanichvili, qui dirige la Géorgie dans l’ombre, ne s’exprime qu’à reculons, lorsqu’il le juge indispensable. Face au scandale national et international soulevé par la réintroduction du projet de loi sur les « agents de l’étranger », calqué sur une loi russe visant à briser la société civile et les médias indépendants, il a fini par sortir du silence, lundi 29 avril au soir.

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Son discours, prononcé devant un parterre de partisans convoyés pour l’occasion, fera date dans l’histoire de cette ex-république soviétique du Caucase du Sud. Pendant vingt minutes, le fondateur et président honoraire du parti au pouvoir, Rêve géorgien, s’est violemment attaqué à la fois aux Occidentaux, à l’opposition et la société civile géorgiennes, regroupés sous la même étiquette, celle d’un supposé « parti mondial de la guerre », qui fomenterait une révolution pour renverser l’actuel gouvernement et déstabiliser le pays.

Sa diatribe, menaçante et conspirationniste, marque un tournant pour ce petit pays de 3,7 millions d’habitants, qui tente depuis des années de sortir du giron de Moscou pour se rapprocher de l’Union européenne (UE). « C’était un manifeste ouvertement anti-occidental, résume Davit Zedelashvili, spécialiste du droit constitutionnel et chercheur au groupe de réflexion indépendant Gnomon Wise, à Tbilissi. Cela entérine clairement la réorientation complète de la politique étrangère du pays depuis l’arrivée au pouvoir de Rêve géorgien il y a douze ans : l’éloignement de l’Europe et le rapprochement avec la Russie, mais aussi la Chine, considérée comme une alternative à l’Occident » et avec laquelle Tbilissi a noué un partenariat stratégique en 2023.

En Géorgie, plusieurs analystes dressent le parallèle entre l’oligarque géorgien et l’ancien président prorusse ukrainien, Viktor Ianoukovitch, chassé du pouvoir par la révolution de Maïdan en 2014, après avoir trahi sa promesse de rapprochement avec l’UE. Bidzina Ivanichvili y a manifestement songé, lui aussi.

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Dans son discours, il cite l’ancien dirigeant ukrainien sous forme de mise en garde : « La Géorgie d’aujourd’hui n’est ni la Géorgie d’[Edouard] Chevardnadze [président géorgien de 1992 à 2003] ni l’Ukraine de Ianoukovitch », mais un pays « gouverné par une équipe solide et unie (…). Il est donc impossible aujourd’hui pour le [principal parti d’opposition] Mouvement national uni, qui bénéficie d’un taux de soutien nul, et les ONG de provoquer un changement de gouvernement ».

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