samedi, octobre 5

Sur scène ou en coulisse, des artistes et responsables culturels profitent du Festival d’Avignon pour se poser trois questions existentielles. Ils se tournent vers le passé pour jauger leur responsabilité dans la montée de l’extrême droite, se demandent comment agir avant le scrutin législatif du dimanche 7 juillet et imaginent à quelle sauce ils seront mangés demain.

Prenons la réunion privée, sans public ni journalistes, qui a eu lieu dans la majestueuse chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon (Gard), à la périphérie de la cité des Papes, les 1er et 2 juillet. Une quinzaine de responsables de directions régionales des affaires culturelles (DRAC) étaient autour de la table. Ces hauts fonctionnaires sont les relais précieux du ministère de la culture dans les villes et villages, font le lien avec l’Etat, attribuent des subventions à des sites patrimoniaux comme à des artistes.

Ces cadres sont tenus au devoir de réserve. Leurs mots sont mesurés. Mais on les sent fébriles. Ils ont su, dans le passé, composer avec des ministres de gauche ou de droite, comme ils le font au jour le jour avec des maires de tous bords. Mais, cette fois, ils craignent l’inconnu et une rupture. Que faire si une directive du ministère heurte leurs convictions ? Rester ou démissionner ? Résister, mais comment ? « Chacun agira en son âme et conscience. » La question est d’autant plus cruciale que, début juillet, chaque DRAC doit faire remonter au ministère de la culture les propositions de subventions pour le budget de 2025.

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La tendance est à garder la tête froide au nom d’un constat : « Le gouvernement n’est pas l’Etat. » Entendez : la gestion culturelle en France, portée par des tempéraments forts et des mécanismes complexes où l’argent de l’Etat se mêle à celui des collectivités locales, dépend autant de l’administration que de ministres souvent remplacés au moment où ils comprennent comment ça marche.

Citadelle assiégée

A la tête du Festival d’Avignon, Tiago Rodrigues est loin de ces combinaisons où il faudra jouer serré. De tous les responsables d’importantes institutions culturelles, il est le plus offensif contre le Rassemblement national (RN). Aussi, dans la nuit du 4 au 5 juillet, la cour du Palais des papes a été le théâtre d’une « Nuit d’Avignon », visant à fédérer des paroles contre l’extrême droite. Son combat est clair : « Nous nous battrons pour qu’au soir du 7 juillet, Avignon entre en célébration plutôt qu’en résistance. » Il qualifie de « trahison » le fait de « collaborer avec l’extrême droite ».

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