mardi, octobre 15
L’accusé Martin Naumann, ancien officier de la police secrète est-allemande, lors de son procès pour meurtre au tribunal de Berlin, le 14 octobre 2024.

Alors que l’Allemagne célèbre cette année les trente-cinq ans de la chute du mur de Berlin, un verdict vient rappeler les heures sombres du régime est-allemand. Lundi 14 octobre, un ancien lieutenant de la Stasi – le ministère de la sécurité de l’Etat de l’ancienne République démocratique allemande (RDA) entre 1950 et 1990 –, aujourd’hui âgé de 80 ans, a été condamné à dix ans de prison par un tribunal de Berlin. Le dénommé Martin Naumann a été reconnu coupable d’avoir abattu, le 29 mars 1974, Czeslaw Kukuczka, un Polonais âgé de 38 ans et père de trois enfants, qui tentait de passer à Berlin-Ouest. Le tribunal a estimé que celui-ci avait été victime d’une embuscade organisée par les services est-allemands. Il s’agit d’une des rares condamnations prononcées à l’encontre d’un ancien agent de la Stasi.

Czeslaw Kukuczka s’était rendu un peu plus tôt dans la journée à l’ambassade de Pologne, alors située près de la porte de Brandebourg, à Berlin, où il avait menacé de faire exploser une bombe supposément placée dans son sac, s’il n’était pas autorisé immédiatement à passer à l’Ouest. L’homme avait alors été escorté par des policiers de la Stasi, elle-même alertée par l’ambassade, jusqu’à la gare de Friedrichstrasse, l’un des points de passage entre les deux parties de la ville. Après avoir été contrôlé, il se dirigeait vers le tunnel menant au métro de Berlin-Ouest lorsqu’il a été abattu. L’enquête révélera par la suite qu’il n’avait pas de bombe dans son sac.

Le tribunal a considéré que Martin Naumann n’avait pas agi de son propre chef puisqu’il avait reçu l’ordre de mettre l’homme « hors d’état de nuire », mais qu’il l’avait néanmoins exécuté « sans pitié » – lui ayant tiré dans le dos alors qu’il se trouvait à deux mètres de lui, quand il aurait pu se contenter de l’immobiliser. Martin Naumann, retraité, est resté silencieux jusqu’à la fin du procès. Son avocate avait demandé l’acquittement, arguant qu’il n’était pas prouvé qu’il était le tireur. Il peut encore faire appel.

« Ne laisser aucune trace »

Révélée avec la publication des archives de la Stasi après la chute du mur, l’affaire est restée longtemps sans suite, alors même que des témoins avaient assisté à la scène. D’après le quotidien Süddeutsche Zeitung, c’est parce que les autorités polonaises ont déposé une demande d’extradition, après la découverte de nouveaux éléments par des historiens en 2016, que le dossier a été rouvert par la justice allemande. Pendant plusieurs décennies, la femme et les enfants de la victime n’ont pas su dans quelles circonstances il avait disparu. Ce n’est que cinquante ans plus tard que ses enfants et sa sœur se sont portés partie civile.

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