samedi, décembre 20

L’escalade des Etats-Unis envers le régime de Nicolas Maduro au Venezuela ne connaît guère de répit. Après le déploiement dans la mer des Caraïbes de l’armada américaine la plus importante depuis la crise des missiles avec Cuba, en 1962, et la multiplication des frappes contre des navires accusés d’être utilisés par des narcotrafiquants, Donald Trump a annoncé, le 16 décembre, un « blocus total » contre les pétroliers sous sanctions américaines se rendant et partant du Venezuela.

Cette tactique, qui ne peut pas mettre fin à toutes les exportations de pétrole, a déjà été mise à l’œuvre avec la saisie d’un tanker début décembre. Le calcul est clair : accentuer la pression sur l’économie vénézuélienne pour précipiter l’éviction de Nicolas Maduro.

A la tête d’un pays riche d’importantes réserves d’hydrocarbures, mais ruiné par l’expérience socialisante chaviste, du nom de son prédécesseur, Hugo Chavez, mort le 5 mars 2013, l’homme fort de Caracas a perdu le peu qu’il lui restait de légitimité démocratique lors de la présidentielle du 28 juillet 2024. Réduite à un processus visant à empêcher toute véritable concurrence politique, cette dernière a été marquée, comme six ans plus tôt, par des fraudes massives au bénéfice du président sortant.

Le président américain, Donald Trump, à Washington, le 17 décembre 2025.

Cette dérive a alimenté un exode de population qui pèse sur l’ensemble du continent, comme l’a montré l’élection présidentielle chilienne, dominée par la question de l’immigration et remportée, le 14 décembre, par le candidat ultraconservateur José Antonio Kast.

Absence de cadre légal

Le départ de Nicolas Maduro est éminemment souhaitable, mais cela ne signifie pas qu’il doive être obtenu à n’importe quel prix. La manière forte privilégiée par la Maison Blanche présente des faiblesses évidentes. Il s’agit tout d’abord de l’ambivalence entre la revendication d’une « guerre contre le narcotrafic » et celle d’un changement de régime à Caracas. L’absence de tout cadre légal pour les frappes, qui ont déjà tué près de 100 personnes, suscite également des critiques fortes, au point de commencer à tirer le Congrès de sa léthargie.

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Les similitudes entre la manœuvre en cours et le précédent irakien, en 2003, alimentent également l’inquiétude. Dans ce pays également riche en pétrole et ruiné par les choix de son dirigeant, Saddam Hussein, l’intervention américaine, présentée comme une promenade de santé, avait provoqué une implosion dévastatrice et un ébranlement régional dont les effets se font encore sentir, vingt ans après.

En faisant de l’Amérique latine un pré carré de Washington, la stratégie de sécurité nationale publiée le 5 décembre par l’administration américaine prépare le terrain au retour d’une politique unilatérale de la canonnière, qui sous-estime les défis que constituerait le renversement brutal du régime en place à Caracas. Les Etats-Unis auraient tout avantage à prendre en considération les offres de médiation du Mexique et du Brésil, soucieux d’éviter une escalade armée en Amérique latine.

D’autant que le temps ne joue pas forcément en faveur de Donald Trump, réputé pour sa versatilité. Une bonne partie de ses électeurs s’opposent aux aventures extérieures, qu’il a lui-même toujours stigmatisées, et la pression sur un président devenu impopulaire va s’accentuer au fur et à mesure que se rapprocheront les élections de mi-mandat, prévues en novembre 2026.

Le Monde

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