Tristan Séguéla, réalisateur de la série « Tapie » : « Ce qui l’intéresse, c’est toujours la conquête d’après »

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« Vous avez vécu par l’image et vous périrez par l’image. » En une scène, impressionnante, de vingt-cinq minutes, le juge Eric de Montgolfier (joué par David Talbot) scelle le sort d’un Bernard Tapie (Laurent Lafitte) sonné, réduit au silence et à l’immobilité dans le fauteuil du bureau du magistrat. La discussion entre les deux hommes remplace, dans le dernier épisode de la minisérie Tapie, le procès qui, en 1995, a signé la déchéance d’un spécimen d’une espèce rare, le self-made-man à la française.

Raconter « Nanar » est une vieille envie du réalisateur Tristan Séguéla, fils du publicitaire Jacques Séguéla, dont la saillie sur la Rolex aurait presque pu être le sous-titre de la série. En préparant son film 16 ans ou presque, au début des années 2010, Tristan Séguéla rencontre Laurent Lafitte et voit en lui l’interprète idéal, même si l’acteur, doté de discrètes prothèses pour les besoins du tournage, ne trouve pas la ressemblance évidente. Contrairement à Tristan Séguéla, il n’a jamais rencontré l’homme d’affaires, mais la gouaille et le charme du personnage le fascinent. Le projet mettra encore une dizaine d’années à se concrétiser, passant d’abord par Canal+, qui finalement recule devant l’hostilité de la famille Tapie, avant d’être récupéré par Netflix.

Tapy contre Polnareff

Retour en arrière, 1966. Un jeune homme en costume défend une chanson populaire au cours d’un télé-crochet qui l’oppose à un chanteur blond fluet et sa Poupée qui fait non. C’est pourtant Bernard « Tapy » (à l’américaine) qui l’emporte. Lorsque Tristan Séguéla et son coscénariste, Olivier Demangel, sont, au cours de leurs recherches, tombés sur cette archive, il leur est apparu évident d’en faire le point de départ de la série. « On a tout de suite su que son envie d’en être était l’axe du personnage, explique Olivier Demangel. Face à lui, Polnareff fait beaucoup plus “musicien”, et pourtant, c’est à Tapie qu’on prédit le succès. C’est tout ce que raconte la série : comment retrouver le succès qu’on m’a promis ? »

Quelques jours plus tard au téléphone, Laurent Lafitte verra lui aussi dans Polnareff le « rosebud » du personnage : « Polnareff incarne son échec en tant qu’artiste. Quand Tapie commencera à avoir du succès dans les affaires, il aura tout de suite envie de refaire l’artiste, c’est à ce moment-là qu’il enregistrera les chansons écrites par Didier Barbelivien. Alors qu’on voit mal Bernard Arnault pousser la chansonnette… Son désir d’exister passe avant tout par la notoriété. »

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