Sur les îles Lofoten, en Norvège, la nature et le théâtre en communion

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On scrute le ciel gris fer, cinglé de rafales de vent et de pluie, pour évaluer à quel moment on va pouvoir tenter une sortie et rejoindre le théâtre, distant d’à peine quelques centaines de mètres. Bienvenue à Stamsund. Ici, au-delà du cercle polaire, entre le 67e et le 68e parallèle nord, la canicule qui sévit sur le reste de l’Europe en ce début de septembre semble appartenir à un autre monde.

Logiquement, à Stamsund, le seul spectacle visible devrait être celui des aurores boréales, qui se déploient, telles des étoffes diaprées, dans le ciel nocturne dès l’automne venu. Mais ce charmant village de pêcheurs, situé sur la face sud de l’île de Vestvagoy, dans l’archipel des Lofoten, qui compte 1 200 habitants quand sa population est au complet, affiche un taux anormalement élevé d’infrastructures théâtrales : trois salles, dont une de renommée internationale, autant de compagnies, et un festival de printemps qui attire des professionnels venus de toute l’Europe. A notre connaissance, un cas unique au monde.

C’est là que la metteuse en scène et marionnettiste Yngvild Aspeli, devenue en quelques années une des figures du renouveau de l’art marionnettique, a créé son nouveau spectacle, Maison de poupée, une version avec pantins de la célèbre pièce de son compatriote Henrik Ibsen. Avant de faire l’ouverture du Festival mondial des théâtres de marionnettes de Charleville-Mézières (Ardennes), le 16 septembre, la pièce a été montrée au village. Dans la petite salle du théâtre se mêlaient des jeunes gens branchés – Stamsund est aussi doté d’une école d’art – et des habitants en bottes et coupe-vent techniques, dans une cohabitation qui visiblement n’étonne plus personne ici.

« Il faut que vous imaginiez à quoi ressemblait le village au début des années 1990, raconte Geir-Ove Andersen, le directeur administratif du Figurteatret, où a été produit Maison de poupée. La crise de la pêche qui a sévi à la charnière des années 1980 et 1990, en raison de la raréfaction du poisson, avait laissé le village sinistré. Il y avait moins de dix enfants à l’école – il y en a aujourd’hui soixante –, tous les commerces étaient fermés, c’était d’une tristesse infinie. »

Renaissance du village

Le renouveau, inespéré, est arrivé grâce à une conjonction de facteurs, comme c’est le cas parfois quand les planètes s’alignent mystérieusement. Les hangars et les usines à poissons désaffectés, propres à installer des ateliers, la lumière polaire, à nulle autre pareille, ont commencé à attirer des artistes sur l’île. Puis un groupe de jeunes gens présentant des difficultés d’insertion dans la société a été envoyé à Stamsund pour créer un spectacle de théâtre. Parallèlement, le gouvernement norvégien cherchait à installer dans le nord du pays un établissement national consacré aux différentes formes de théâtre visuel.

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