Le miroir turquoise du grand bassin de la piscine de la Butte-aux-Cailles, à Paris, attend les nageurs. Sa surface lisse reflète la voûte haute et les arches en béton blanc de ce monument historique aéré dans ses lignes Art déco. Samedi 16 et dimanche 17 septembre, il est l’écrin de la performance Iris, mise en scène par le chorégraphe Alessandro Sciarroni, qui ouvre la 52e édition du Festival d’automne. « Je suis fasciné par le fait qu’une piscine est un espace public dont les différents lieux sont les cadres de rituels précis, déclare-t-il. J’en aime le son, qui me fait penser à quelque chose de religieux, comme une cathédrale. »
Régulièrement programmé dans la manifestation depuis 2014, l’artiste italien muscle ses pièces avec des pratiques loin de la danse. Il y développe une fibre jusqu’au-boutiste nouée par la notion d’exploit. Untitled_I Will Be There When You Die (2013) épuisait quatre jongleurs à force de virtuosité acérée. Aurora (2015) déclinait le geste du goalball, jeu de ballon pratiqué par des personnes déficientes visuelles.
Pour Iris, en lien avec les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, il invite douze choristes ainsi que sept nageurs âgés de 12 à 37 ans, dont certains sont des athlètes porteurs de handicap. « J’ai un grand respect pour eux, affirme-t-il. Ils ont une passion immense en dépit de leurs moyens financiers différents des autres sportifs. C’est une communauté que je veux soutenir. » Enfant, il confie qu’il était gardé par une tante atteinte de trisomie et en a conservé une attention pour « les corps et les esprits non conformes ».
Mélodies a cappella
Guidé par l’atmosphère de la piscine, Sciarroni a imaginé une déambulation qui démarre dès les vestiaires. Sur deux étages, les chanteurs accueillent les deux cents spectateurs par des mélodies a cappella d’inspiration sacrée, avant de les accompagner autour du bassin. Les choristes et les nageurs se rejoignent dans l’eau. « Cela n’a pas été facile d’apprendre à flotter et chanter en même temps, indique Sciarroni. L’eau est un endroit de contact. On y oublie la gravité en se reconnectant avec soi-même. »
Iris ajoute une nouvelle page au chapitre des spectacles contemporains en piscine. Historique et inoubliable, Waterproof, chorégraphié en 1986 par Daniel Larrieu, pour dix interprètes, et recréé en 2006 à la piscine Auguste-Delaune de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), immerge le public dans une ensorcelante lévitation. Sur l’eau, dessous, dans les nappes d’un entre-deux miroitant, les danseurs en maillot noir étirent des formes paradoxalement graphiques et ondoyantes.
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