La scène nationale Le Quartz, à Brest, vit une situation inédite. Mercredi 8 février, Maïté Rivière, nommée directrice par Roselyne Bachelot, alors ministre de la culture, en mars 2021, a été suspendue de ses activités. Des salariés de son équipe dénoncent sa gestion humaine défaillante. Sans consulter les tutelles qui subventionnent le lieu et auraient eu leur mot à dire, Stéphane Maby, directeur général de Brest’aim (la société d’économie mixte qui gère Le Quartz via une délégation de service public), démet alors la directrice. « De nombreux employés ont fait état de leur souffrance au travail. Face aux risques psychosociaux, j’ai pris mes responsabilités », soutient-il.
Une décision dont il n’aurait préalablement informé que Brest Métropole, laquelle se repose depuis des décennies sur Brest’aim pour s’occuper de ses établissements. Dans le giron de la société, se trouvent ainsi Le Quartz, Océanopolis (le grand aquarium de la ville), le Palais des congrès ou encore le stationnement payant. Pour Fabienne Loir, secrétaire générale de l’Association des scènes nationales, « le statut particulier du Quartz n’a jusqu’alors jamais posé problème. Mais ce qui se passe actuellement met en lumière son dysfonctionnement ». Les méthodes de Brest’aim sont en effet singulières. Au point que seul Stéphane Maby devrait recevoir les résultats de l’enquête qu’il a lui-même confiée à un cabinet de conseil privé.
Un inconfortable nomadisme
SVP Travail et organisation recueille ces jours-ci les doléances de l’équipe du théâtre. Le maintien ou le licenciement de Maïté Rivière dépend de ses conclusions. Sauf si le ministère de la culture parvient enfin à faire entendre sa voix. Il a diligenté en urgence l’Inspection générale des affaires culturelles pour une mission effectuée par des professionnels qui connaissent la réalité des scènes nationales.
Ce sera l’occasion, espère Maïté Rivière, « d’objectiver ce qui est en train de se jouer ». Et sans doute d’éviter de suspendre le sort d’un label national au verdict d’un chef d’entreprise. Du côté des salariés du Quartz, on se montre prudent. Diane Courvoisier, secrétaire générale, attend le retour du cabinet de conseil : « Il est important de prendre soin de l’équipe car c’est elle qui met en œuvre les projets. »
Maïté Rivière, pour sa part, dit n’avoir aucune information sur les faits qui lui sont reprochés : « Je suis dans l’incapacité de me défendre. » Quelles sont les fautes imputées à cette quadragénaire dont le projet artistique a dû s’adapter aux contraintes ? Depuis deux ans, le théâtre est fermé à cause d’un chantier de rénovation qui le condamne à un inconfortable nomadisme. Ce que rappelle à juste titre, sur les réseaux sociaux, David Bobée, patron du Théâtre du Nord, à Lille : « Pour avoir vu la directrice en fonctions, je l’ai trouvée présente, impliquée, dynamique, respectueuse, responsable face à une équipe éprouvée par la pandémie et les mesures sanitaires, les interminables travaux, le long “hors les murs” et qui était, malgré tout ça, engagée. » En septembre, un Quartz flambant neuf devrait rouvrir ses portes au public. Avec ou sans femme à sa tête.