Le monde grouillant d’Antoine Caron au Musée de la Renaissance d’Ecouen

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Antoine Caron (1521-1599) n’est pas le plus célèbre des artistes du XVIsiècle. Pourtant, durant sa longue vie, il a travaillé pour cinq rois de France et une régente, Catherine de Médicis. En sa compagnie et celle de son fils, il a effectué un tour du royaume qui est resté dans les annales : partie de Paris en janvier 1564, la cour (15 000 personnes), cheminant lentement – il a fallu une semaine pour rejoindre Fontainebleau ! –, a exploré le pays pendant deux ans, trois mois et six jours avant de retrouver le confort relatif des palais parisiens.

Il s’agissait de faire connaître le petit Charles IX – 13 ans à l’époque – de son peuple et surtout, après la première guerre de religion, de mettre en scène dans tout le pays les fastes de la puissance royale pourtant devenue précaire. Or, la mise en scène, c’était le rayon de Caron. C’est ce que montre l’exposition, la première à lui être consacrée, du Musée national de la Renaissance à Ecouen. Riche de plus de 90 œuvres – peintures, tapisseries, dessins ou gravures –, elle est sous-titrée « Le théâtre de l’histoire », et à en visiter les cinq salles on comprend pourquoi.

S’il est peu probable que Caron ait suivi tout le périple royal – il peint au même moment plusieurs œuvres d’importance, peu compatibles avec l’inconfort d’un tel voyage, dont son tableau le plus connu et le seul qu’il ait signé, Les Massacres du triumvirat –, il a su en restituer à merveille l’image que le pouvoir souhaitait en laisser. Ainsi, la tapisserie intitulée La Cour de France quittant le château d’Anet (Le Voyage), si elle symbolise plus l’ensemble des pérégrinations des rois que ce grand tour en particulier, témoigne de l’ampleur de la chose.

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Des piquiers précèdent des cavaliers – nobles, ça va de soi – suivis des dames, en carrosse ou en litière, de chevaux chargés de bagages, d’animaux de compagnie, des chiens de chasse ou de guerre, ou d’autres semi-sauvages destinés aux divertissements (un montreur d’ours tenant son fauve par une chaîne et lui flattant le cou accompagne le cortège), pendant qu’au loin des serviteurs démontent les tentes de ceux qui n’avaient pu trouver à se loger dans le château lui-même. Détail charmant, un couple d’amoureux en bordure de la route néglige totalement le spectacle, entièrement consacrés qu’ils sont l’un à l’autre. Le tout forme une longue procession sinueuse et, il faut l’admettre, remarquablement composée.

Coût de fabrication faramineux

Elle fait partie d’un ensemble de huit tapisseries tissées à Bruxelles à partir de cartons dessinés par Caron, commandées par Catherine de Médicis et réalisées à la fin des années 1570. Elles furent offertes par la régente elle-même à sa petite-fille Christine de Lorraine, grande-duchesse de Toscane, pour orner son palais florentin : cadeau royal, tant la tapisserie, notamment à cause de son coût de fabrication faramineux (on y entrelace des fils de laine, de soie, d’or et d’argent), était un des arts majeurs de cette époque.

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