L’architecte David Chipperfield remporte le prix Pritzker 2023

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Le Pritzker nouveau est arrivé. C’est David Chipperfield qui a décroché la timbale. L’architecte britannique, âgé de 69 ans, est l’auteur d’une centaine de bâtiments dont l’intelligence formelle, l’élégance souveraine, le pragmatisme programmatique, le luxe d’espace, de lumière et de matériaux, incarnent une très haute idée de la discipline, qu’on pourrait dire héritière de celle de Mies van der Rohe (1886-1969). Ce prix, doté de 100 000 dollars (93 800 euros) et remis mardi 7 mars, vient distinguer l’œuvre entière, comme le fait le Nobel dans d’autres disciplines.

Le choix du jury pourrait passer pour un reniement de la part d’une institution qui semblait vouloir valoriser, ces dernières années, une idée à la fois plus sociale, plus écologique, plus politique de l’architecture que celle qu’elle incarnait à l’origine. Créé en 1979 par Jay Pritzker, fondateur, avec son frère Robert, des hôtels Hyatt, le prix Pritzker a accompagné, tout au long des années 1980 et jusqu’au début des années 2010, le phénomène de la « starchitecture », célébrant volontiers les gestes ostentatoires et gratifiant leurs auteurs – presque exclusivement des hommes – du statut de demi-dieux.

Le jury a insisté sur le caractère civique de l’architecture de David Chipperfield, sur le fait qu’elle n’est pas au service de son auteur, mais du bien commun

Les trois derniers lauréats du Pritzker, le tandem féminin irlandais Shelley McNamara et Yvonne Farrell, les champions français de la réhabilitation de logement social, Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal, ou encore le Burkinabé Diébédo Francis Kéré, témoignent d’une nette inflexion en la matière, dont l’impulsion remonte au début des années 2010, quand ont été distingués le Portugais Eduardo Souto de Moura (2011) et le Chinois Wang Shu (2012).

Mais il serait dommage de réduire David Chipperfield à cette condition de mâle blanc dominant. Composé d’architectes renommés, lauréats pour certains du prix Pritzker, d’un historien de l’architecture (Barry Bergdoll), d’un ancien juge de la cour suprême des Etats-Unis (Stephen Breyer), et présidé par Tom Pritzker, le fils de Jay, le jury a insisté sur le caractère civique de l’architecture de David Chipperfield, sur le fait qu’elle n’est pas au service de son auteur, mais du bien commun. La part importante que prend, dans son travail, la transformation des bâtiments anciens a également été soulignée comme un point déterminant.

Permanence de l’architecture

David Chipperfield a beau être l’un des représentants de la culture occidentale la plus sophistiquée, il a toujours porté un jugement sévère sur ces objets sculpturaux, spectaculaires, qui ont si longtemps eu les faveurs de l’institution. La question qui l’obsède, c’est celle de la permanence de l’architecture, qui le conduit à concevoir ses bâtiments comme des objets en prise avec la culture et les dynamiques urbaines, capables de mettre les villes au diapason de leur époque.

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