En juin, Claude Fléouter avait fait parvenir à la documentation du Monde quelques feuillets manuscrits qui retraçaient sa carrière de producteur, de réalisateur et d’écrivain. Manquaient à cette ébauche de nécrologie les étapes de sa collaboration avec le quotidien, de 1964 à 1991, mais aussi la fondation, en 1985, des Victoires de la musique, puis celle, en 1994, des Victoires de la musique classique. Et sa date de naissance. Claude Fléouter est mort le 15 novembre à Orléans, après avoir probablement passé les 80 ans puisque son père – comme l’a raconté Le Télégramme de Brest, quotidien de sa ville natale – est mort pendant la seconde guerre mondiale.
Pupille de la nation, il suit des études de droit et commence à France-Observateur sa carrière journalistique, par des chroniques théâtrales. Pour Le Monde, il rend d’abord compte de spectacles de variétés, entre chanson et cirque (au milieu des années 1960, Eddy Mitchell est encore précédé d’acrobates et de jongleurs), avant de s’intéresser au rock.
Lors du passage des Rolling Stones à l’Olympia en mars 1966, il entend « une parodie grotesque du rhythm and blues ». Deux mois plus tard, dans la même salle, il voit en Bob Dylan, qui poursuit en France la tournée entamée à l’Albert Hall londonien, « un authentique poète ». La même année, il produit son premier documentaire, consacré à Johnny Hallyday, réalisé par Claude Goretta. Le film sera diffusé dans l’émission « Cinq colonnes à la une ». Il produira ensuite, pour l’ORTF, des dizaines de films pour la collection « Une musique, un pays », souvent en collaboration avec Robert Manthoulis. Il assiste aux grands festivals de rock européens, comme Wight ou Amougies, tout en continuant de raconter le quotidien de la chanson française.
Les Victoires de la musique
En 1973, l’un de ses articles évoquant un spectacle de Michel Fugain et le Big Bazar lui vaut, ainsi qu’au Monde, d’être attaqué en justice par le parolier Pierre Delanoë. Ce dernier est furieux que le journaliste ait estimé qu’il a « massacré » les textes de Bob Dylan en les adaptant pour Hugues Aufray, et qu’il ait cité au long les paroles d’une chanson destinée à Fugain pour les moquer. Quatre ans plus tard, le plaignant sera débouté en appel.
En 1985, Claude Fléouter, associé à Denys Limon au sein de Téléscope Audiovisuel, fonde les Victoires de la musique, initiative soutenue par Jack Lang. En 1994, le duo lance les Victoires de la musique classique. Deux ans plus tard, le journaliste est écarté de l’association qui gère les Victoires. Lors de l’édition 1995, de sérieux doutes ont entouré la Victoire de la révélation féminine, qui se trouve être produite par Denys Limon. Suivront de longues procédures judiciaires qui ne permettront pas au fondateur de retrouver sa place aux Victoires, mais qui se concluront par un jugement faisant état de son licenciement abusif.
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