« Humour droite-gauche », sur Paris Première : un clivage bien français, mais moins évident qu’il n’y paraît

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PARIS PREMIÈRE – LUNDI 11 SEPTEMBRE À 22 H 50 – DOCUMENTAIRE

Le prétexte est volontairement simpliste : sachant que, en France, tout est de droite (auto Peugeot, vacances sur la Côte d’Azur, pratique du golf, lecture du Figaro…) ou de gauche (auto Renault, vacances en Bretagne, pratique de la randonnée, lecture de Libération…), appliquons ce classement binaire aux humoristes, afin de vérifier l’adage « dis-moi ce qui te fait rire, je te dirai pour qui tu votes », sous-titre du documentaire de ce soir.

En commençant, arbitrairement et pour ne citer qu’un exemple, par Coluche et Thierry Le Luron, immensément populaires à partir du milieu des années 1970, après avoir débuté, pour le premier, au café-théâtre, pour le second, comme imitateur.

Pour répondre, un panel d’intervenants. Tout d’abord deux historiens particulièrement pertinents, Pascal Ory (de l’Académie française) et François Cusset, historien des idées, tout comme la sociologue Nelly Quemener, juchée sur un tabouret haut. Puis de nombreux humoristes et deux personnalités politiques conviées pour des raisons qui restent à préciser : l’ancien député (Résistons !) Jean Lassalle et la députée écologiste Sandrine Rousseau.

« Politiquement correct »

Cette dernière loue « l’humour subversif de Coluche », forcément de gauche. Confortée par Franjo : « Taper sur la police, c’est de gauche. » Sauf que, pour le journaliste (de gauche) Jean-François Kahn, « si on veut classer [Coluche],il faut le mettre dans les inclassables ». Avant de laisser place aux mêmes tergiversations au sujet de Thierry Le Luron. « Ce n’est pas parce qu’on est de gauche qu’on ne rit pas aux humoristes de droite », assure Sandrine Rousseau.

L’« enquête pour rire » se poursuit en chapitres chronologiques, tous introduits par des interludes qui auraient pu être moins nombreux afin de laisser plus de place aux extraits de sketchs – Guy Bedos, Blanche Gardin, Haroun, Les Inconnus, Jamel Debbouze, Gad Elmaleh.

Les interventions font sourire, mais pas seulement. « L’humour donne à rire et à penser », rappelle Sébastien Thoen, quand François Cusset cite le philosophe Gilles Deleuze : « Le pouvoir nous veut tristes », parce qu’un peuple triste serait plus facile à diriger. Plus loin, Frédéric Fromet, qui intervient dans la revue de presse de France Inter chaque matin, « en toute liberté », depuis une décennie, se remémore la violence des réactions après avoir chanté Coulibaly, Coulibalo en 2015 – après les attentats : « Ah ! Ah ! Allah akbar, vous n’avez rien dans le calbar ! (…) Les fous d’Allah sont des tocards », ironisait-il.

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Parler d’évolution de la société conduit inévitablement à traiter de l’arrivée des premières femmes humoristes, puis de celle des humoristes issus des minorités, pour mener tout droit au « politiquement correct ». Ne plus se moquer des accents étrangers, est-ce un progrès humain ou une régression de la liberté d’expression ? « Commençons par nous en réjouir », suggère François Cusset.

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Humour droite-gauche : dis-moi ce qui te fait rire, je te dirai pour qui tu votes, de Patrice Bousquet (Fr., 2023, 65 min).

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