Caroline Polachek, une Calypso pop au timbre acrobatique

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Poignées de fans attroupés devant la Salle Pleyel, à Paris, plusieurs heures avant un concert à guichets fermés ; textes repris en chœur, quatre jours seulement après la sortie de son nouvel album, Desire, I Want to Turn Into You ; ferveur extatique d’applaudissements à rallonge… Le retour, samedi 18 février, de Caroline Polachek sur une scène parisienne, quatre ans après un premier passage au Pitchfork Music Festival, démontrait le changement de statut de cette Américaine de 37 ans, longtemps cantonnée à une niche underground.

Dans un décor d’île volcanique, figurant l’ardeur amoureuse et la vitalité du désir, la chanteuse new-yorkaise, transformée en Calypso pop, jouait de mélismes de sirène au rythme éclectique de ses nouvelles chansons.

Elans héroïques (Welcome to my Island), boucle flamenco (Sunset), moiteur funky (Bunny is a Rider), dance music « eighties » (I Believe), drum’n’bass (Fly to You), folk délicat (Butterfly Net) et même cornemuse (Blood and Butter)… Un bouquet luxuriant apte à séduire un large public, sans que la dame renonce à sa singularité, repérée avec le duo Chairlift. Dans ce tandem électro-pop formé avec Patrick Wimberly, pointait déjà une fantaisie portée par un timbre acrobatique, un goût entremêlé des refrains accrocheurs et des audaces formelles, une façon très graphique de mouvoir sa longue silhouette, allant de pair avec une créativité visuelle jouant de l’onirisme comme de l’autodérision.

Celle qu’un journaliste anglais a qualifiée de « Kate Bush de la génération Z » affirme plus encore ce profil dans un Desire, I Want to Turn Into You qui tresse l’éloge d’une passion romantique, vibrant entre fièvre charnelle et tendresse fusionnelle.

« Mais ce désir est aussi une pulsion de vie, propre aux dynamiques de l’expérience musicale », analyse Caroline Polachek, rencontrée dans les coulisses de Pleyel, quelques heures avant son concert. Une vitalité amplifiée encore par le contexte pandémique de l’enregistrement. « En rappelant que le chaos domine le monde, la crise du Covid nous a réveillés de notre confort léthargique », assure l’Américaine. « Cela fait partie du rôle de l’artiste de porter cet élan vital et d’harmoniser cette instabilité », ajoute celle qui a perdu son père, victime du coronavirus.

L’énergie de cette hyperactive s’est nourrie d’une existence nomade. Née à Manhattan en 1985, elle passe les six premières années de sa vie à Tokyo. Le Japon a gravé sa marque. « Nos premiers souvenirs d’enfant sont autant d’expériences esthétiques, souligne la musicienne. Le graphisme et les musiques des dessins animés japonais des années 1980 font partie de ce qui m’a façonnée. » Tout comme d’autres moments plus traumatisants. « Je me souviens des exercices d’alerte aux tremblements de terre. Il fallait se couvrir, s’abriter sous les bureaux, cela me terrifiait. J’ai appris à cette occasion que les adultes ne contrôlaient rien de la puissance de la terre. »

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