Un corps de joueur de basket – 1,95 mètre ; la tête du cow-boy de Toy Story dont il participa à l’écriture du scénario, à peine sorti de l’école ; et un petit salut désarmant de la main : le réalisateur multi-oscarisé (Là-haut, Vice-Versa) Pete Docter est ici pour Elémentaire, de Peter Sohn, en salle mercredi 21 juin et présenté en clôture du Festival de Cannes. C’est le dernier-né du studio d’animation américain Pixar dont il est devenu directeur artistique, il y a cinq ans.
Vous étiez très proche de John Lasseter qui fut la tête pensante de Pixar – il était même votre témoin de mariage. Comment avez-vous réagi lorsqu’il a admis, en 2017, dans la foulée de l’affaire Weinstein, avoir eu des comportements inappropriés, qui l’ont mené à la démission après des excuses publiques ?
Ce fut très dur, très compliqué. J’ai eu quelques conversations avec lui. L’homme a apporté tellement au film d’animation, à Pixar en particulier… Mais on était comme un groupe de rock, dès le premier Toy Story, en 1995, Andrew Stanton, Joe Ranft, Lee Unkrich, et moi-même, on était là, on savait quel genre de musique on allait jouer. C’était organique, on avait à peine besoin de se parler. Si je dirigeais un film, John et Andrew m’épaulaient et si Andrew dirigeait, pour Le Monde de Nemo par exemple, on l’aidait. En général, l’un d’entre nous élaborait un projet, puis les autres le regardaient et multipliaient les critiques : il manque ça ici, on ne comprend pas ça là. Avec cette affaire, le groupe a explosé.
Vous vous demandiez à l’époque si vous seriez capable de prendre sa place. Avez-vous la réponse aujourd’hui ?
Non, je me pose toujours la question. Pour moi, le plus grand défi, c’est de savoir comment faire au mieux avec les artistes, parce que c’est leur voix qu’il faut faire éclore, c’est elle qui parle dans les films. A dire vrai, on bosse toujours de la même façon, mais c’est un nouveau groupe, une nouvelle version de Pixar.
Ça ne vous manque pas de ne plus faire de films ?
Bien sûr que ça me manque. Enfin j’espère que ce n’est pas une porte à sens unique, j’ai bon espoir qu’un jour je pourrai en refaire un… Maintenant, cinq ans après, je peux dire que j’y ai découvert des joies inattendues. Pouvoir soutenir les réalisateurs, voir que mes conseils peuvent les mettre sur le bon chemin, aider à résoudre un problème… Certains demandent à être encadrés, d’autres nécessitent qu’on leur laisse les mains libres… Mais la vérité, c’est que chacun d’entre nous a besoin de l’aide des autres.
Il vous reste 59.65% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.