Cannes 2023 : « La Passion de Dodin Bouffant », le pot-au-feu indigeste de Tran Anh Hung

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SÉLECTION OFFICIELLE – COMPÉTITION

Au huitième jour, la compétition cannoise a pris le bouillon. Pendant plus de deux heures, La Passion de Dodin Bouffant, de Tran Anh Hung, chronique de la félicité amoureuse au XIXe siècle entre un châtelain gastronome, Dodin (Benoît Magimel), et sa cuisinière hors pair, Eugénie (Juliette Binoche), suscite beaucoup de perplexité, de l’ennui et quelques envies de fou rire.

Adapté d’un roman, La Vie et la passion de Dodin-Bouffant, gourmet, de Marcel Rouff, paru en 1920, le film célèbre l’art de bien manger, à la française, et de vivre en harmonie. Le tout sans aspérités ni enjeu dramatique, hormis le fait qu’Eugénie est atteinte d’un mal mystérieux. Tout cela est bien pauvre, quand on sait ce que la table et les repas ont pu produire comme chefs-d’œuvre au cinéma – La Grande Bouffe (1973), de Marco Ferreri, entre autres.

Français d’origine vietnamienne, né en 1962, le réalisateur et scénariste a été révélé à Cannes avec L’Odeur de la papaye verte, son premier long-métrage, qui obtint la Caméra d’or en 1993. Cyclo, polar stylisé dont l’action se déroule dans les rues de Ho Chi Minh-Ville, décroche ensuite le Lion d’or à Venise en 1995. En 2000, A la verticale de l’été est sélectionné à Un certain regard. Tran Anh Hung n’avait plus tourné depuis Eternité (2016), avec Audrey Tautou, Bérénice Bejo et Mélanie Laurent.

Un Lamartine de la marmite

Les vingt premières minutes de La Passion de Dodin Bouffant nous plongent dans le bain. C’est le matin, Eugénie cueille ses légumes dans le potager – le film a été tourné dans un château en Anjou. Puis elle arrive dans une belle cuisine à l’ancienne – pierre, bois, plaques en fonte – et se met aux fourneaux, assistée d’une servante et d’une jeune fille en formation. Toute une chorégraphie se met en place, les légumes à couper, à faire mijoter, le four que l’on ouvre, l’eau que l’on verse… Heureuse en cuisine, aimable, Eugénie rayonne, et Juliette Binoche sert à chacun de ses gestes un sourire satisfait.

Dodin Bouffant, toujours affable, reçoit bientôt ses convives. Il partage généreusement sa table et ses impressions gustatives autour de phrases ampoulées. Il faut voir Benoît Magimel, avec son collier de barbe, engoncé dans sa jaquette, considérer son verre de vin rouge et lancer gravement : « Race, élégance et pureté. »

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On est en droit de se demander comment un film aussi académique se retrouve en lice pour la Palme d’or. Aimer, c’est manger, nous dit le cinéaste, et le récit tourne en boucle : couleurs chaleureuses, plans aux petits oignons magnifiant les mets sublimes dans leurs chaudrons en cuivre – le chef triplement étoilé Pierre Gagnaire a été appelé comme consultant sur le tournage et fait une courte apparition dans le film.

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