Cannes 2023 : la double vie de Mia Wasikowska

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Elle tourne la tête à gauche, à droite, en évitant de croiser votre regard. Ce qu’elle dit lui coûte, les mots sortent à grand-peine. Mia Wasikowska, l’actrice la mieux payée au monde il y a une douzaine d’années, ferait ses adieux à Hollywood qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. « Je veux juste vivre une vie agréable, être dans le coup m’indiffère. Le monde des studios est étrange, non ? Les films n’y sont qu’une chose parmi d’autres. Le poids de la mode est démesuré », lâche celle qui, jadis, courait les défilés.

A 33 ans, la comédienne dit n’avoir aucun projet, si ce n’est écrire et réaliser un film. « Je cherche à le financer, je ne m’attendais pas à ce que ce soit si laborieux. Une de mes histoires se passe en Australie, l’autre ici, en Europe. On verra. » Elle remet les mèches de son carré blond en place, derrière ses oreilles. « Je n’ai rien contre Los Angeles, mais je veux vivre dans un endroit où le cinéma n’est pas l’industrie dominante. Sydney est une belle ville, la nature y est omniprésente, ma famille n’est pas loin. J’y ai grandi, j’y reste»

Fallait-il inviter son partenaire dans Alice aux pays des merveilles (Tim Burton, 2010), Johnny Depp, à monter les marches ? « Ah, je ne sais pas… Quoi que je réponde, ce sera utilisé contre moi », bredouille Mia Wasikowska, avant de murmurer : « J’ai aimé travailler avec lui. J’ai l’impression que les gens oublient ses films, non ? » Elle faillit devenir ballerine, avant que ses professeurs ne lui annoncent qu’elle n’avait pas le corps adéquat. « Adolescente, renoncer à la danse me semblait un sacrifice énorme. Avec le recul, c’est moins le cas. »

Kieslowski, son cinéaste de cœur

Elle s’est rabattue sur le cinéma, sollicitant une douzaine d’agents, jusqu’à ce que l’un d’eux réponde. Même technique avec les studios, dont elle fit le siège pour décrocher le rôle de la malicieuse Alice. Aujourd’hui, elle se contente de trier parmi les propositions qu’on lui soumet, avec un faible pour les cinéastes indépendants. Si elle se félicite d’avoir tourné pour David Cronenberg, Guillermo del Toro, Gus Van Sant ou Jim Jarmusch, elle regrette d’avoir manqué Carol (2015), le drame lesbien de Todd Haynes, pour cause d’emploi du temps incompatible.

Lire la critique : Article réservé à nos abonnés Cannes 2023 : « Club Zéro », Jessica Hausner à l’école de la jeunesse éternelle

Sur la Croisette, elle présente Club Zéro, de l’Autrichienne Jessica Hausner, en compétition. « Mia Hansen-Løve, avec qui j’ai fait ce merveilleux film sur la créativité féminine qu’est Bergman Island (2021), m’a dit le plus grand bien de Jessica. C’est une cinéaste très visuelle, elle sait ce qu’elle veut. » De celle qu’elle incarne dans Club Zéro, une prof de « nutrition consciente » incitant ses élèves à cesser de s’alimenter, elle dit : « Le scénario insistait davantage sur son côté manipulateur. Jessica tenait à ce que mon personnage croie sincèrement à ses préceptes. » Pour préparer le film, tourné dans les environs verdoyants d’Oxford, en Angleterre, elle a rencontré d’anciens membres de sectes. « Je n’ai rien contre la pleine conscience, au contraire. Mais imposer une doctrine à des ados vulnérables, rendus anxieux par la crise climatique, ça ne va pas»

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