Ava Cahen, déléguée générale de la Semaine de la critique du Festival de Cannes : « Les films de la sélection sont marqués d’une forte empreinte politique »

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Déléguée générale à la Semaine de la critique depuis 2022, Ava Cahen et son comité de sélection ont visionné mille longs-métrages, un nombre quasi identique à celui de l’année précédente. Parmi eux, onze films ont été retenus, dont sept seront en compétition, laissés aux soins d’un jury présidé par la scénariste et cinéaste Audrey Diwan, dont L’Evénement fut couronné en 2021 du Lion d’or à la Mostra de Venise. Nous les avons rencontrées à Paris, quelques jours avant le début de la Semaine (du 17 au 25 mai).

Parmi les films que vous avez reçus pour cette édition, qu’avez-vous pu constater de particulier ?

Ava Cahen : Nous avons noté que des territoires un peu ensommeillés les années précédentes – à cause du Covid-19 qui a beaucoup touché les pays d’Asie, ou de contextes politiques difficiles comme au Brésil – sont présents cette année. Après avoir subi une chape de plomb, on sent que le cinéma de ces pays se libère, tant sur la créativité que sur les sujets traités. Parallèlement, d’autres territoires sont restés très silencieux : nous avons peu reçu de films russes et ukrainiens. En revanche, certains films européens nous renvoient l’écho de cette guerre, comme le film du réalisateur serbe Vladimir Perisic, Lost Country, sur l’éveil politique d’un jeune garçon prenant conscience que sa mère est du mauvais côté de la barrière.

Sous-entendez-vous que cette édition sera très politique ?

A. C. : On dit souvent que nous choisissons les films, mais ce sont eux aussi qui nous choisissent. Et c’est vrai ! Nous ne pensons pas à une thématique quand nous sélectionnons, mais il est clair que, cette année, les films sont marqués d’une forte empreinte politique. Sur tous les sujets, y compris ceux concernant la condition des femmes. Avec, par exemple, Inshallah a Boy [Inchallah un fils], d’Amjad Al Rasheed, premier film jordanien à être présenté à Cannes, qui raconte le combat d’une mère de famille pour ses droits, alors que la société jordanienne ne lui impose que des devoirs. Ou Tiger Stripes, de la réalisatrice malaisienne Amanda Nell Eu, sur l’émancipation d’une jeune fille dans une société hyperpatriarcale.

Audrey, comment appréhendez-vous cette Semaine de la critique ?

Audrey Diwan : Avec évidemment beaucoup d’intérêt, et ce à plusieurs égards. D’abord, parce que j’entretiens un rapport sain avec la critique. J’ai toujours apprécié la vertu d’un regard extérieur, quelle que soit sa nature. La critique aide à l’architecture d’une pensée et j’en ai besoin. Je la lis, l’écoute en tant que cinéphile et en tant que cinéaste. Ensuite, parce que je me sens à la même place que les cinéastes dont je vais regarder les œuvres. La Semaine est dévolue aux premiers et deuxièmes longs-métrages. Or, L’Evénement a reçu le Lion d’or et c’était mon deuxième film. Je sais l’effet, par la mise en lumière partout dans le monde, que produit un festival sur le parcours et le destin d’un film. J’ai donc l’impression d’être à l’endroit adéquat.

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