FRANCE CULTURE – À LA DEMANDE – PODCAST
« Je suis une femme de lettres, historienne, ancienne diplomate et féministe », ainsi commence chacun des cinq épisodes qui compose ce « A voix nue » que consacre Caroline Broué à Claudine Monteil. Et c’est merveilleux de constater que l’engagement féministe de celle qui fut une proche de Simone de Beauvoir est resté non seulement intact, mais particulièrement énergique.
Mais reprenons puisque c’est l’essence de cette émission que de retracer le parcours de celles et ceux qui marquent notre temps. Episode 1, Claudine Monteil naît en 1949 d’une mère chimiste, Josiane Serre, qui fut directrice de l’Ecole normale supérieure de jeunes filles, et d’un père mathématicien, Jean-Pierre Serre, qui fut professeur au Collège de France. Et de rappeler que ce dernier lui offrit, le jour de ses 15 ans, l’exemplaire du Deuxième Sexe, le livre de Beauvoir que lisait sa mère quand elle était enceinte.
A l’épisode 2, Claudine Monteil raconte comment, engagée dans le mouvement maoïste, elle rencontre Sartre et, à l’épisode suivant, comment, accompagnée de Marceline Loridan, elle ose pousser la porte d’une réunion du Mouvement de libération des femmes (MLF) et ce, malgré l’interdiction des maoïstes de rejoindre cette bande d’« hystériques ». Sauf que « j’y vais quand même et je me sens à ma place, dit-elle. J’avais 20 ans et tout le monde était là : Anne Zelensky, Monique Wittig, Delphine Seyrig, Gisèle Halimi ».
Lutte intergénérationnelle
De Simone de Beauvoir Claudine Monteil se souvient d’abord : « Elle parlait à toute allure et il fallait penser aussi vite qu’elle. » Emue, elle aura ces mots : « Elle a été une écrivaine, une militante jusqu’à son dernier souffle. C’est une héroïne, une icône. »
A l’épisode 4, elle se remémore ses années MLF et c’est très stimulant. Elle raconte les coulisses de la signature du « Manifeste des 343 salopes », qui paraît dans Le Nouvel Observateur le 5 avril 1971 et qui réclame la légalisation de l’avortement. Elle se souvient qu’il leur aura fallu se battre jour après jour, et passer des nuits entières à débattre et à s’organiser, avec peu de moyens et sans réseaux sociaux, pour se faire entendre.
Elle rappelle aussi – et c’est l’objet de l’épisode 5 – que rien n’est jamais acquis. En effet, après une fête des femmes qui avait eu lieu à la Cartoucherie de Vincennes (Val-de-Marne) et, devant le succès de cet événement, exprimant son enthousiasme à Simone de Beauvoir, Claudine Monteil se souvient de ce que l’auteure du Deuxième Sexe lui dit alors et qui est resté si fameux : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. »
Malheureusement, ajoute Claudine Monteil, « la vie m’a prouvé qu’elle avait raison : il n’y a qu’à voir ce qu’il se passe en Iran, en Afghanistan, en Pologne et même aux Etats-Unis depuis la révocation de l’arrêt Roe versus Wade, qui accordait aux Américaines le droit d’avorter dans tous le pays, laissant les Etats américains libres d’interdire l’IVG ».
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Inquiète, certes, celle-ci se refuse pourtant à être pessimiste. Dit qu’elle continuera à se battre. Insiste sur l’importance de la lutte intergénérationnelle. Salue la vague #metoo et invite à s’emparer des réseaux sociaux, nouvel instrument pour faire connaître, diffuser et avancer la cause des femmes.
« A voix nue », émission de Caroline Broué réalisée par Séverine Cassar. Sur le site de France Culture et toutes les plates-formes d’écoute habituelles