A Montpellier, les révélations Gheilan et « Aïta mon amour » portées par le festival Arabesques

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Dimanche 17 septembre, fin de matinée. Quelques heures avant la clôture de la 18e édition d’Arabesques à Montpellier, avec le Trio Joubran, les trois frères compositeurs et joueurs d’oud palestiniens, Habib Dechraoui, directeur et fondateur de ce festival pluridisciplinaire dédié aux arts du monde arabe avait des raisons de se réjouir. La journée et la soirée s’annoncent sous de bons augures. La veille, malgré une météo catastrophique et une « alerte rouge » pour cause d’orages annoncés, levée seulement en début de soirée, l’amphithéâtre en plein air du Domaine d’O, où est installée sous la pinède une médina éphémère, un public nombreux assistait au concert de Gnawa Diffusion. Le groupe du chanteur et homme de scène accompli Amazigh Kateb se produisait ici pour la troisième fois. Tout comme la tête d’affiche prévue ce dimanche soir.

Quelques redites donc dans la programmation – ce n’est pas le seul festival à pêcher sur ce point –, mais Arabesques reste toujours un révélateur de talents. En témoigne cette année, Gheilan, une autre fratrie de musiciens palestiniens, un trio de musique instrumentale qui fut lauréat 2023 de Palestine Connect, un projet lancé il y a trois ans par le festival Arabesques, avec l’Institut français de Jérusalem et des partenaires palestiniens. Gheilan se produisait pour la première fois en France la veille, dans la salle boisée du Théâtre Jean-Claude-Carrière, au Domaine d’O.

« Trace de l’oppression »

Le public a découvert trois jeunes musiciens trentenaires, un peu intimidés, originaires de Jérusalem, Canaan (oud, compositions), Mohammed (qanun) et Maen Al Ghoul (percussions, batterie). Tous les trois ont fréquenté le conservatoire de musique palestinien Edward-Saïd pendant plusieurs années avant de s’en émanciper, de tracer leur propre chemin créatif. Sans renier ce qu’ils ont acquis de la tradition musicale arabe. « Nous avons cette responsabilité d’y puiser et de la transmettre mais en la nourrissant de nos diverses influences, de ce que nous aimons écouter : musiques du monde, dubstep, jazz, musique indienne…  » confiaient-ils avant de monter sur scène. Toutes les compositions sont signées par Canaan, le plus âgé des trois (31 ans). « Elles portent la trace de l’oppression de l’occupation, de l’anxiété que nous subissons », explique-t-il. Et de leur espoir aussi de se sentir un jour « libres, plus heureux, en paix en Palestine ».

C’est également de transmission créative que parle le trio marseillais Zar Electrik, programmé sur la même scène, qui mixe transe gnaoua et boucles electro ou, encore plus, la chanteuse marocaine Widad Mjama, associée au musicien tunisien Khalil Epi (machine, mandole, loutar – instrument à cordes berbère) dans Aïta mon amour, leur relecture puissante de la Aïta, une tradition vocale marocaine d’origine rurale remontant aux XIIe et XIIIe siècles, transmise oralement. « Les femmes [les chikhates, chanteuse et danseuses populaires] ont joué un rôle déterminant dans sa transmission », explique la chanteuse. Et de lancer au public : « Il faut danser, relâcher un peu de toutes les tensions en nous. Après les choses qui se sont passées dernièrement, nous avons besoin de joie, j’en ai besoin ! » Une salve de youyous s’envole dans la salle.

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