Walsh en quatre-vingts films, sur une palette qui va de l’exultation à la fureur, du charme à l’incongruité, voilà bien du plaisir que promet la Cinémathèque française, à Paris. Parmi la sainte trinité du classicisme hollywoodien (où il figure aux côtés de John Ford et de Howard Hawks), le rôle du fils lui convient à merveille. Soit une manière corruptible d’être dans l’histoire, dans la chair, dans la passion. La lutte, en un mot, sur le terrain du péché.
Brillant de mille genres (western, polar, film noir, comédie musicale, mélodrame…), brûlant d’une énergie indéfiniment renouvelée, aussitôt que consommée, quatre-vingt-treize années d’existence à cheval sur deux siècles (1887-1980), dont cinquante ans de création (1914-1964), soit plus de cent films réalisés entre muet et parlant.
Il est d’autant moins aisé de délimiter les contours de l’œuvre de Raoul Walsh. La boussole la plus fiable est, à cet égard, celle qui pointe vers son goût de l’action, frénétique, confinant parfois au délire. L’action, c’est la seule morale du cinéaste. Elle est une sorte de « sur-vie » débordant de l’écran, impétueuse et chaotique, follement aventureuse, sensuelle, pulsionnelle, souvent, et pour cette raison même, tragique.
On ne considérera pas comme un hasard que l’un de ses rôles les plus marquants comme jeune acteur ait été celui de John Wilkes Booth, l’assassin du bon président Lincoln, abattu dans un théâtre, dans Naissance d’une nation (1915), de David Griffith. Voilà ce qu’on aime chez Walsh : sa confrontation férocement vitaliste à la sauvagerie de la jeune scène américaine.
Etincelant dédale
Le voici qui signe la même année, comme réalisateur, Regeneration, premier film de gangsters de l’histoire du cinéma. Filmée dans le quartier de Bowery, toute la cruauté des bas-fonds new-yorkais y est exprimée entre réalisme documentaire, chronique sociale et vision lyrique. Dans Le Voleur de Bagdad (1924), fantasmagorie grandiose, Douglas Fairbanks, petit voleur, tombe amoureux de la femme du calife. Au service de la gloire (1926) organise, sur fond de boucherie de la première guerre mondiale, la rivalité sexuelle de deux soudards amoureux d’une fille d’aubergiste français. Dans Annie du Klondike (1936), Mae West, danseuse légère déguisée en missionnaire chrétienne convoitée par un capitaine de cargo, fait parler sa poudre. En 1942, Gentleman Jim est un film pugilistique inégalé où Errol Flynn incarne un héros décrochant, à force d’intelligence et d’élégance, sa victoire sur le monde.
Il vous reste 59.15% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.