Le débat sur les zones à faibles émissions (ZFE), supprimées en commission, arrive à l’Assemblée nationale mardi dans le cadre de la proposition de loi sur la simplification.
Le gouvernement a déposé un amendement qui reviendrait à conserver celles de Paris et Lyon, les deux villes pour lesquelles les seuils sont dépassés.
Pour autant, cela ne signe pas la fin des ZFE dans les autres grands villes de France. Explications.
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Initiatives environnementales
Les ZFE vont-elles disparaître ? Demeurer en l’état ? Maintenues mais modifiées ? Le débat arrive à l’Assemblée nationale mardi, dans le cadre de la proposition de loi sur la simplification, après un vote en Commission lors duquel les députés se sont exprimés en faveur de la suppression des zones à faibles émissions.
Pour rappel, ce dispositif, rendu obligatoire en 2019 puis élargit en 2021 pour les villes qui dépassent certains seuils en terme de qualité de l’air et d’émissions de particules fines, a des visées sanitaires. Selon Santé Publique France, la pollution de l’air est en effet responsable de 48 000 décès prématurés chaque année et 30 000 cas d’asthme chez les enfants.
Il est toutefois critiqué par certains car souvent, ce sont les ménages les plus modestes qui sont propriétaires des véhicules concernés par les restrictions de circulation. Mais ce sont aussi eux qui sont les plus touchés par les pathologies liées à la qualité de l’air, vivant dans des zones urbaines où les seuils sont dépassés.
Des ZFE obligatoires seulement dans les villes qui dépassent les seuils pendant trois années sur les cinq dernières ?
Alors, que faire ? Le gouvernement a déposé un amendement pour tenter de conserver le dispositif tout en l’adaptant. Défendant un modèle qui « a fait ses preuves » dans la lutte contre la pollution de l’air, le cabinet de la ministre de la Transition écologique propose de conserver une obligation pour les agglomérations qui dépassent des seuils réglementaires de qualité de l’air pendant trois années sur les cinq dernières. De fait, cela ne concernerait que Paris et Lyon.
Si l’amendement était adopté, cela supprimerait l’obligation d’instaurer des ZFE dans toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants, et répondrait donc aux demandes des oppositions (la suppression en commission a été proposée par le RN, suivi par des voix de la droite et du bloc central, avec des abstentions à gauche).
Mais il permettrait tout de même de conserver le dispositif : obligation à Paris et Lyon, donc, et ailleurs, des restrictions à la main des élus locaux. L’amendement prévoit aussi d’assouplir le cadre d’application et notamment les exceptions déjà prévues, en considérant que l’étude préalable à l’instauration d’une ZFE puisse permettre des dérogations basées sur des facteurs comme la « qualité du réseau de transports en commun« , ou « la présence d’axes de contournement« .
42 territoires avec des restrictions de circulation, mais de très grandes différences
Aujourd’hui, 42 territoires sont concernés en France par ce type de restrictions, mais en réalité, elles sont très différentes d’une ville à l’autre, en fonction des dispositions prises par les élus locaux.
Ainsi, beaucoup de villes dans l’Hexagone n’ont réduit la présence que des seuls véhicules non classés, qui, à ce titre, ne disposent pas de la vignette crit’air. Certaines y ont ajouté les véhicules utilitaires légers et les poids lourds crit’air 5 (diesel immatriculé entre 1997 et 2000).
En réalité, seules Paris et Lyon ont aujourd’hui l’obligation, faite par l’Etat, de restreindre la circulation des véhicules les plus polluants.
A Paris et Lyon, des « pass » pour circuler quand même une partie de l’année
Sont par exemple interdits dans la zone ZFE à Paris (qui couvre 77 communes) :
- les véhicules non classés (immatriculés avant 1996)
- les crit’air 5 (diesel entre 1997 et 2000)
- les crit’air 4 (diesel entre 2001 et 2005)
- les crit’air 3 (essence immatriculées avant 2006 et diesel avant 2011)
Cette interdiction vaut du lundi au vendredi pour les véhicules particuliers, de 8h à 20h, sauf jours fériés ; et 7 jours sur 7 aux mêmes horaires pour les bus, les cars et les poids lourds. Un « pass 24 heures » est disponible pour les véhicules restreints qui ont l’autorisation de circuler pendant 24 jours dans la ZFE.
Enfin, pour l’interdiction de circulation des crit’air 3, entrée en vigueur au 1er janvier 2025, une période pédagogique est en cours : pas d’amende pour les éventuels contrevenants.
Marseille et Grenoble ont mis en place le même type de restrictions, jusqu’aux véhicules classés crit’air 3, mais de façon volontaire et non imposée par le gouvernement.
Objectif du gouvernement : garder les ZFE pour les villes qui le souhaitent
Avec son amendement, l’idée du gouvernement est donc de permettre ce type de situation pour les agglomérations souhaitant mettre en place ce dispositif. « Nous souhaitons conserver une base légale pour que les collectivités qui souhaitent continuer à en mettre en place puissent le faire simplement« , précise ainsi le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher.
En revanche, si les ZFE venaient à être supprimées lors du vote, il serait difficile, voire impossible, pour une agglomération qui le souhaiterait de maintenir des restrictions de circulation.
Agnès Pannier-Runacher organisera ce mois-ci un « Roquelaure de la qualité de l’air » pour « réunir les élus des territoires où la qualité est significativement en deçà des recommandations » de l’OMS et « améliorer les dispositifs existants« .
En dehors des conséquences sanitaires et environnementales, la suppression pure et simple des ZFE pourrait coûter à la France plus de 3 milliards d’euros d’aides européennes, selon une note de la Direction générale du Trésor citée par le média Contexte. Pour rappel, les ZFE ne sont pas un dispositif propre à la France, et existent dans de nombreux pays européens selon différentes modalités, avec là aussi, des résultats en terme de santé publique.