lundi, novembre 25

Plusieurs réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima, au Japon, avaient explosé après le passage du tsunami en 2011.
Depuis, la décontamination est en marche, en dépit de nombreuses zones encore inaccessibles à l’homme, à cause d’un danger mortel.
Une équipe du 20H a pu accéder au plus près de ces installations détruites, dont la dépollution devrait durer plusieurs décennies.

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Les enquêtes de FX

C’est sans doute l’endroit le plus dangereux au monde, hors zones de conflits. Localement, à Fukushima, les radiations sont si intenses que même les robots qui s’y avancent ne répondent plus, en quelques secondes. Au total, 5.000 travailleurs sont présents sur le site de la centrale nucléaire, ravagée en mars 2011 par un tsunami, qui avait suivi un puissant séisme dans l’est du Japon. Aujourd’hui, ces agents se dirigent vers les réacteurs endommagés par les explosions consécutives à cette catastrophe. La zone n’est pas sûre, et il faut respecter des règles draconiennes. 

Masque, gants, dosimètre permettant de contrôler la quantité de radiations. Toute une panoplie est nécessaire pour se protéger de cet ennemi invisible, afin de s’approcher des lieux de la catastrophe nucléaire . Une plateforme fournit une vue sur la zone des réacteurs endommagés. Interdiction d’y rester plus de 15 minutes : au pied, la radioactivité monte en flèche. Des travailleurs se relaient sur place pour ne pas dépasser les doses journalières auxquelles ils peuvent être exposés, comme le montre le reportage exceptionnel du 20H à retrouver en tête de cet article. 

Un chantier qui doit durer 40 ans

Des embranchements métalliques rouillés constituent le vestige du réacteur numéro 1, dont l’ossature a été endommagée il y a 13 ans, au moment de l’explosion d’hydrogène depuis les entrailles du bâtiment. Cette zone est strictement interdite pour les humains, car trop fortement irradiée. Tout récemment, un mini-drone a pu filmer une partie du combustible nucléaire ayant fondu. Au total dans la centrale, cela représente 880 tonnes de matière hautement radioactive. Comment l’extraire ? Pour en faire quoi ensuite ?

Treize ans après la catastrophe, les défis pour poursuivre la décontamination du site sont encore immenses. Un exemple. L’utilisation complexe d’une tractopelle, servant au déblaiement des débris radioactifs. Pour pouvoir la déplacer au pied du réacteur n°1, les experts utilisent des grues télécommandées à distance. Mais au vu du niveau de radiation, un individu à l’intérieur mourrait presque immédiatement. Tepco, l’opérateur de la centrale, a donc dû provisionner des sommes astronomiques pour financer le chantier, qui devrait durer quarante ans. « On estime le coût du démantèlement, du coût de la centrale à près de 60 milliards d’euros, explique un responsable de l’électricien. Mais pour le moment, si on regarde sur les 13 premières années, on a seulement dépensé 15 milliards d’euros.« 

Mur antitunami et sécurité drastique

Aujourd’hui, les six réacteurs de la centrale sont à l’arrêt. Aujourd’hui, l’urgence absolue est de protéger le site d’un autre tsunami. En 2011, la vague de 15 mètres avait détruit une bonne partie des installations. Le système de refroidissement tombe en panne et trois énormes explosions surviennent alors. Les cœurs de trois réacteurs entrent en fusion. Pour éviter le même scénario, un mur anti-tsunami a été érigé aux abords de la centrale, longée par l’océan Pacifique. L’installation, qui n’était pas assez haute au moment de la catastrophe, a mis cette fois deux ans à sortir de terre. 

Plus au nord, les autorités ont autorisé depuis près d’un an le rejet d’eau contaminée, qui a servi à refroidir l’intérieur de la centrale après les déflagrations. Pour accéder à l’endroit où est rejeté ce liquide, la sécurité est encore plus drastique. Notre équipe ne peut pas filmer une grande partie des lieux. Chaque déplacement est par ailleurs calculé pour éviter une exposition trop importante. En fonction de l’espace dans lequel les agents se trouvent dans la centrale et de la dangerosité de la radioactivité, les blouses, chaussettes ou gants à porter sont de diverses épaisseurs. 

De l’eau radioactive relâchée dans l’océan

L’eau qui a servi à refroidir les réacteurs est stockée dans des centaines d’immenses cuves. Très radioactive, elle est aujourd’hui traitée, puis relâchée dans le Pacifique. Ces rejets par intermittence devraient durer pendant une trentaine d’années. Selon Tepco, il n’y aurait aucun risque pour la santé. « L’eau, une fois traitée, passe dans plusieurs tuyaux, détaille à notre caméra un responsable des opérations. Elle remonte dans une grande cuve, où elle est ensuite diluée 700 fois avec de l’eau de mer, puis rejetée dans l’océan.« 

Impossible cependant de traiter le tritium, ce résidu provenant de l’exploitation des réacteurs. Quels risques une fois dans l’océan, notamment pour les poissons ? L’entreprise a mis en place une expérimentation, avec l’élevage de quelques-uns d’entre eux dans des bassins remplis avec de l’eau traitée. Selon elle, les poissons se portent bien. Des mesures sont aussi régulièrement communiquées pour rassurer la population, alors que son voisin, la Chine, critique vertement ces rejets dans la mer. Pékin a même ordonné un boycott des poissons japonais de la région de Fukushima.

La suite du reportage de François-Xavier Ménage dans la « zone rouge » autour de la centrale de Fukushima est à retrouver dans la vidéo en tête de cet article.


T.A. | Reportage : François-Xavier MÉNAGE et Olivier CRESTA

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