lundi, mai 20

Une petite tour Eiffel et quatre figurines souriantes représentant une famille. C’est à peu près tout ce que Tamara Abu Auda, 25 ans, a pu emporter dans sa fuite de la ville de Gaza. Les souvenirs reposent désormais sur l’appui de la fenêtre de sa chambre donnant sur une cour entourée de bâtiments gris, à Odessa, en Ukraine. Situé dans la périphérie pauvre de la ville portuaire, l’immeuble reconverti en centre social n’accueillait jusque-là que des exilés intérieurs originaires des territoires occupés par l’armée russe. Depuis quelques mois, un étage entier a été réservé à trente-deux femmes et enfants arrivés de Gaza, fuyant une autre guerre que celle qui ravage l’Ukraine depuis plus de deux ans.

Tamara Abu Auda, 25 ans, avec sa mère, Tatiana Abu Auda, 49 ans, à Odessa (Ukraine), le 26 avril 2024.

Tamara Abu Auda et ses deux enfants de 5 et 7 ans, Tala et Ayham, font partie de la cinquantaine de ressortissants ukrainiens à avoir été évacués de la bande de Gaza, dans les premiers jours du mois du mars. « Nous avons traversé beaucoup d’épreuves, lâche la grand-mère, Tatiana Abu Auda, 49 ans, et il nous est difficile de reprendre goût à la vie. Une partie de la famille est ici, l’autre est restée là-bas. Nous ne savons pas ce que nous réserve l’avenir. »

Ce 26 avril est une journée calme à Odessa, une exception tant les bombardements russes sur la ville sont réguliers. Les enfants jouent et crient dans la cour ensoleillée de l’immeuble qu’ils occupent. Au 5étage, depuis la chambre qu’elle partage avec Tamara, Tala et Ayham, Tatiana Abu Auda jette un regard attendri sur l’extérieur. « Les enfants peinent à trouver le sommeil après tout ce qu’ils ont traversé. » Cela faisait plus de quatorze ans que cette femme originaire de la ville de Melitopol, désormais contrôlée par l’armée russe, n’était pas venue dans son pays de naissance.

Depuis 1998, sa vie se déroulait dans la bande de Gaza. Comme des centaines d’autres femmes qui composaient la communauté ukrainienne de l’enclave (1 500 personnes ces dernières années, selon le site de la représentation diplomatique de Palestine en Ukraine), Tatiana avait décidé de s’y installer par amour. En 1992, alors qu’elle étudiait à l’université d’agronomie de Kharkiv, grande ville de l’est du pays, elle y avait fait la rencontre de Nadil, 55 ans aujourd’hui, un Palestinien venu comme d’autres se former dans la toute jeune Ukraine indépendante.

Dispersion de la communauté

En 1998, ils ont rejoint la ville de Gaza, où ils ont eu quatre filles : Tamara, Diana, Nadia et Nour. « Nous étions heureux », dit simplement Tatiana. Nadil travaillait dans une compagnie d’électricité. Les deux filles plus âgées se sont à leur tour mariées. Les deux plus jeunes rêvaient de devenir chanteuse pour l’une, photographe pour l’autre.

Il vous reste 71.36% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version