Livre. La pollution sonore est un préjudice déjà sous-estimé pour la santé des populations humaines – le deuxième facteur de risque environnemental en Europe derrière la pollution de l’air, selon l’Organisation mondiale de la santé. Dans Le Chant perdu des baleines (Actes Sud, 352 pages, 23,50 euros), Laurence Paoli, autrice d’essais de vulgarisation scientifique sur la nature, nous livre une enquête dense et précise sur les dégâts plus délétères encore qu’occasionnent les bruits humains sur les créatures marines, des crevettes aux baleines bleues.
Une mise en immersion qui relate l’émergence de la bioacoustique sous-marine, et ses découvertes scientifiques majeures des dernières décennies. Celle du sofar, par exemple, acronyme de sound fixing and ranging channel. Ce canal est situé à 150 mètres de profondeur, entre deux couches d’eau, où l’augmentation de la pression « piège » les ondes sonores et les diffuse extraordinairement loin – ce qui permet aux baleines de communiquer sur des milliers de kilomètres.
Dans ce registre scientifique, l’autrice détaille les façons qu’ont les cétacés d’émettre et d’entendre des sons à des fréquences qui échappent largement à l’homme, et de s’en servir « pour se nourrir, repousser des prédateurs, trouver un partenaire, s’orienter et communiquer », notamment par l’écholocalisation. Celle-ci leur permet de trouver leur nourriture, en utilisant l’écho que renvoie leur cible, tout en créant une carte mentale de l’océan.
Sonars et prospection sismique
Ce sont ces capacités qui sont attaquées de façon létale par les activités humaines : au premier rang desquelles les sonars basse fréquence des marines militaires. Alors que la marine américaine étend son système de surveillance de sonar aux trois quarts de l’océan mondial, Laurence Paoli en souligne les conséquences : les baleines affolées arrêtent de vocaliser, dévient de leur route migratoire, se regroupent pour « échanger visuellement, puisqu’elles ne peuvent plus le faire oralement ».
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