mercredi, octobre 9

Le bureau de l’Assemblée nationale a décidé de saisir la justice du cas de l’ex-ministre Aurore Bergé pour « faux témoignage ».
Ils l’accusent d’avoir récusé devant une commission d’enquête tout lien personnel avec une lobbyiste des crèches privées.
L’élue des Yvelines peut-elle être poursuivie par la justice, et que risque-t-elle ?

« Aurore Bergé devra rendre des comptes pour avoir menti devant la représentation nationale », s’est félicité sur X la cheffe des députés insoumis, Mathilde Panot. En effet, ce mercredi, le Bureau de l’Assemblée nationale a décidé de saisir la justice du cas de l’ex-ministre macroniste Aurore Bergé, accusée par des députés insoumis et écologistes de « faux témoignage » pour avoir récusé devant une commission d’enquête tout lien personnel avec une lobbyiste des crèches privées, alors que dans son livre-enquête le journaliste Victor Castanet évoque un « pacte de non-agression » conclu entre l’ex-ministre des Familles Aurore Bergé et la déléguée générale de la Fédération française des entreprises de crèches (FFEC), Elsa Hervy.

La première question qui se pose ici, c’est : une députée poursuivie par la justice, est-ce possible ? Aurore Bergé est-elle protégée par son immunité parlementaire ? C’est l’article 26 de la Constitution (nouvelle fenêtre)qui précise dans quels cas un député ou un sénateur est protégé par son mandat. « Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions », indique l’alinéa 1, qui ne concerne donc pas le cas susmentionné. En revanche, l’alinéa 2 indique qu’« aucun membre du Parlement ne peut faire l’objet, en matière criminelle ou correctionnelle, d’une arrestation ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté qu’avec l’autorisation du bureau de l’assemblée dont il fait partie ». Puisque le Bureau de l’Assemblée a donné son accord pour saisir la justice, l’immunité parlementaire d’Aurore Bergé ne fonctionne pas.

« Cette décision de transmission ne vaut pas décision de justice »

Toutefois, attention, celle-ci n’est pas encore poursuivie en justice. La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a d’ailleurs pris soin de rappeler devant la presse que « cette décision de transmission ne vaut pas décision de justice ». Seul le procureur est « libre de poursuivre ou pas et d’enquêter sur ces faits », a insisté l’ex-avocate. « Tout est désormais entre les mains du procureur, c’est lui qui devra apprécier la matérialité des faits, estimer s’il y a eu une omission volontaire, et s’il a des éléments probants décider si oui ou non, il faut engager des poursuites », a ajouté auprès de TF1info Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public à l’université de Poitiers. « Pour qu’il y ait procès, il faut qu’il y ait des poursuites, et ce stade n’est pas atteint. »

Si jamais des poursuites sont engagées, que risque Aurore Bergé ? L’article 434-13 du Code pénal (nouvelle fenêtre) précise que « le témoignage mensonger fait sous serment devant toute juridiction ou devant un officier de police judiciaire agissant en exécution d’une commission rogatoire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende ». La « juridiction » peut-elle être une commission d’enquête parlementaire ? Oui, selon l’ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. À son article 6, on lit qu‘ »en cas de faux témoignage ou de subornation de témoin, les dispositions des articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal sont respectivement applicables »

La gauche n’en finit plus son naufrage politique et démocratique. »

Aurore Bergé

Si un procès est demandé par le procureur, la députée des Yvelines risque donc jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende. L’article 434-14 du Code électoral ajoute même que « le témoignage mensonger est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100.000 euros d’amende lorsqu’il est provoqué par la remise d’un don ou d’une récompense quelconque ». Mais le chemin est encore loin. 

Aurore Bergé a regretté à l’issue de la décision du Bureau de l’Assemblée que le Nouveau Front populaire ait « sans surprise décidé une nouvelle fois de se soumettre à LFI » et à sa « demande infondée » à son encontre. « La gauche n’en finit plus son naufrage politique et démocratique », a-t-elle déploré.


Justine FAURE

Partager
Exit mobile version