samedi, mai 18
Dans une coopérative à Hermankono (Côte d’Ivoire), le 14 novembre 2023.

Les hauts et les bas du cacao. La poudre brune est aux prises avec la spéculation. Rien de nouveau en soi, si ce n’est l’ampleur du phénomène cette fois. Fin octobre 2023 déjà, alors que les premières papillotes de Noël se pavanaient dans les étalages des supermarchés, le cacao commençait à s’enflammer sur les marchés. Il se négociait alors à 3 800 dollars (3 543 euros) la tonne à New York, et les observateurs, avides de comparaison historique, pointaient le fait qu’un tel niveau n’avait pas été atteint depuis 1979. Le cacao décroche le cocotier, pensaient-ils.

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Mais ils n’avaient encore rien vu. Avec le cacao, les spéculateurs ont tiré la fève. En février, à New York, le cours du fruit du cacaoyer pulvérisait, en effet, son record historique datant de 1977, pour dépasser la barre des 6 000 dollars la tonne. D’aucuns s’imaginaient alors que le paroxysme de la fièvre acheteuse était atteint. Que nenni. L’appétit du gain ne s’est pas démenti. Le cacao a continué à caracoler au plus haut.

A Pâques, la tension médiatique était maximale. Même si cette flambée spectaculaire des cours n’était pas encore vraiment perceptible sous forme d’inflation en rayon, l’inquiétude des amateurs de douceurs chocolatées montait au gré des marchés. Mi-avril, le cacao enregistrait des prix record, s’échangeant à 11 722 dollars la tonne à New York et à 9 285 livres sterling (10 820 euros) la tonne à la Bourse de Londres.

Des récoltes moins plantureuses

Pour justifier cette ruée vers l’or noir, les investisseurs ont mis dans la balance le déséquilibre entre l’offre et la demande. Les récoltes en Afrique de l’Ouest où bat le cœur du cacao ont été moins plantureuses qu’espéré. En Côte d’Ivoire, pays qui pèse à lui seul 45 % de la production mondiale, les pluies abondantes, source d’attaques fongiques, ont fait place à une chaleur intense et à des vents desséchants. Un cocktail météo propre à faire ployer la production des cacaoyers.

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La maigre rémunération des planteurs, qui ne se font guère de beurre avec le cacao, contribue aussi à la réduction des volumes de fèves. Face à la flambée des cours, le prix d’achat du cacao aux planteurs de Côte d’Ivoire a toutefois été revalorisé de 50 % à 1 500 francs CFA (2,30 euros) le kilo. Un tarif plus alléchant pour la récolte intermédiaire qui se déroule d’avril à septembre.

Est-ce la perspective de ces nouveaux émoluments, l’arrivée en Côte d’Ivoire de pluies attendues depuis longtemps, ou plus sûrement la limite du jeu dangereux des flux d’argent ? Depuis une dizaine de jours, le vent tourne sur les marchés. Coup sur la cabosse de cacao ! Et la chute est aussi brutale que l’ascension fut spectaculaire. Le prix de la tonne de cette précieuse denrée est passé sous la barre des 7 000 dollars, vendredi 3 mai, soit un plongeon de près de 40 % par rapport à son record. Le marché du cacao sent la poudre…

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