Unité, optimisme, énergie impressionnante, mobilisation résolue : la convention démocrate à Chicago, dans l’Illinois constitue une réussite. L’exercice, dépourvu de tout suspens au sujet de l’investiture de Kamala Harris, relevait du spectacle politique festif et du concours oratoire. Il n’était pas question de sujets de fond complexes, mais d’intentions affichées et de professions de foi, dans une sorte de messe progressiste. Détail révélateur, le texte programmatique du parti n’avait même pas été actualisé et évoquait encore un 2e mandat à venir de Joe Biden.
La finalité de la convention était de poser les bases d’un récit électoral et de confirmer la dynamique en cours. Elle est surtout parvenue à un prodige, en matière de communication politique : la réinvention de Kamala Harris, à 59 ans. Figure sortante de l’administration, la voilà symbole de nouveauté, incarnation d’un espoir transformatif. Vice-présidente engoncée dans un rôle trop contraint, la voilà immaculée, rebaptisée, engagée dans une autre interprétation, seule en scène, y prenant un plaisir évident. Kamala Harris a manqué, par deux fois, son rendez-vous avec le peuple américain : d’abord lors des primaires démocrates en 2019, puis comme vice-présidente, une période où elle a beaucoup tâtonné sans trouver sa voie. La voilà bénie d’une nouvelle chance, comme si les deux précédentes n’avaient pas existé.
Ce rendez-vous de la famille démocrate, du lundi 19 au jeudi 22 août, avait été précédé par des semaines intenses de fébrilité et de réévaluation, en raison du changement de candidat. Cela paraît si lointain – un mois déjà ! – mais de nombreux cadres démocrates, angoissés par les vulnérabilités de Kamala Harris, défendaient en juillet le principe d’une convention ouverte, précédée d’une vraie compétition télévisée entre prétendants. Un risque trop grand, si proche de l’échéance électorale. Une fois le retrait de Biden acquis, il fallait une discipline et une vigueur sans faille. La promotion éclair de la vice-présidente puis de son colistier, Tim Walz, le gouverneur décapant du Minnesota, a été accueillie avec soulagement et espoir au sein du parti, conforté rapidement par une vague favorable de sondages nationaux et dans les Etats-clés.
A Chicago, Joe Biden a pris la parole le premier soir, lundi, à une heure indue. Il a mis toute son énergie restante à détailler son bilan favorable. Il a été très applaudi, puis raccompagné vers la sortie sous les clameurs, canard boiteux (« lame duck », président en fin d’exercice) avançant vers son crépuscule. Embaumé vivant et déjà relégué dans la vitrine de l’histoire, qu’on revisite à l’occasion. « Forward » (« en avant ») est la formule clé de la campagne. Ce mouvement vif, impitoyable, est à couper le souffle. Il fut particulièrement clair dans la soirée du mardi, lorsque Michelle Obama puis son époux Barack, enflammèrent la salle par leur charisme et leur catéchisme civique.
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