dimanche, mai 12

Dans la lutte contre le crime organisé et contre les réseaux de trafiquants de drogues, « ce qui nous manque, c’est des témoins », a expliqué ce dimanche 28 avril sur BFMTV Éric Dupond-Moretti. Pour briser l’omerta, la loi du silence, le ministre de la Justice a ainsi annoncé sa volonté de créer un « véritable statut de repenti ». En échange de sa collaboration avec la justice, le repenti pourrait bénéficier d’une réduction de peine et d’une protection.

Ce nouveau statut prendrait la suite d’une législation datant de 2004, un texte jugé peu efficace par le garde des Sceaux. « Je souhaite qu’on s’inspire de ce que font les Italiens avec beaucoup d’efficacité », a ajouté Éric Dupond-Moretti dans un entretien à la Tribune Dimanche. « Face aux organisations criminelles de la mafia, le statut de repenti a permis de grandes victoires. »

Tommaso Buscetta, un cas emblématique

Chez nos voisins transalpins, les repentis sont en effet essentiellement des mafieux qui ont fait le choix de devenir des « collaborateurs de justice », le terme officiel pour qualifier les « pentiti » italiens. Ce statut puise cependant son origine dans le contexte politique mouvementé de la fin des années 1970, les « années de plomb », durant lesquelles l’Italie était secouée par des actes de terrorisme menés par des groupes d’extrême gauche et d’extrême droite.

Depuis le début des années 1990, la législation sur les repentis s’applique quasi exclusivement à des membres de la mafia. En la matière, Tommaso Buscetta a fait partie des précurseurs. Dès 1984, cette figure de Cosa nostra, surnommé « le boss des deux mondes », a accepté de vider son sac devant le juge Giovanni Falcone, engagé dans une lutte acharnée contre la mafia sicilienne. Les révélations de Tommaso Buscetta aboutiront quelques années plus tard à la tenue du « maxi-procès » de Palerme et à la condamnation de plus de 300 prévenus.

Ces dernières années, les arrestations menées grâce aux repentis se comptent par centaines. Si les individus complices ou eux-mêmes auteurs de crimes acceptent de fournir des « informations fiables, nouvelles, complètes et déterminantes » pour les besoins d’une enquête ou d’un procès, c’est en échange de certaines contreparties, comme une réduction de peine. Eux et leurs proches peuvent aussi faire l’objet de mesures de protection spécifiques de la part de l’État italien (versement d’une allocation, transfert dans une autre commune, voire, dans les cas les plus exceptionnels, changement d’état civil).

Un millier de repentis en Italie

Des dispositions parfois jugées insuffisantes par des repentis étant par ailleurs cibles de menaces de la part des réseaux dont ils étaient autrefois membres. « Nous sommes traités comme des moins que rien, sans la possibilité de refaire notre vie en sécurité: pas de documents d’identité crédibles, pas d’aides pour reprendre une activité professionnelle, aucune prise en compte des dangers liés à nos révélations », affirmait ainsi en 2019 au Monde Luigi Bonaventura, un ancien boss de la mafia calabraise, la Camorra.

Actuellement en Italie, il y a environ 1.000 repentis se trouvant sous la protection de l’État et 5.000 membres de leurs familles sont aussi protégés. Le mois dernier, l’une des grandes figures du crime organisé dans le pays a rejoint leurs rangs. Franceso Schiavone, ancien chef du clan des Casalesi, considéré comme le plus puissant de la mafia napolitaine, la Camorra, est à son tour devenu un « pentito ».

Un virage opéré après 26 années passées derrière les barreaux. Impliqué dans une série de règlements de comptes violents dans les années 1980 et 1990, il avait été condamné en 1998 à plusieurs peines de prison à perpétuité.

Article original publié sur BFMTV.com

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