samedi, mai 18
Pendant la Semaine de Pâques, dans l’église du Saint-Sépulcre, dans la vieille ville de Jérusalem (Israël), le 28 mars 2024.

Rafic Nahra est évêque auxiliaire du Patriarcat latin de Jérusalem et « vicaire patriarcal » de Nazareth, ce qui en fait le représentant de l’Eglise catholique dans cette ville du nord d’Israël, où Jésus a, selon la tradition chrétienne, passé son enfance. Il est de passage à Paris, ce dimanche 5 mai, à l’occasion de la Journée des chrétiens d’Orient, organisée par L’Œuvre d’Orient.

Pascal Gollnisch est, quant à lui, directeur général de cette institution catholique apportant son soutien aux projets (éducatifs, humanitaires, sanitaires ou culturels) portés par des communautés chrétiennes d’Orient, de l’Ukraine à l’Inde, en passant par le Levant, l’Arménie, la Corne de l’Afrique, mais aussi Israël et la Palestine. Dans un entretien au Monde, les deux prélats dressent un état des lieux critiques de la situation en Terre sainte, celle des chrétiens comme de l’ensemble de la population.

A bientôt sept mois des massacres du 7 octobre et alors que la guerre à Gaza ne semble trouver aucune issue, croyez-vous encore à la paix ?

Rafic Nahra : Les perspectives, pour le moment, sont extrêmement difficiles : il y a un tel cumul de méfiance, de violence et de rancune de tous les côtés. Les Palestiniens n’en peuvent plus d’attendre leur droit à l’autodétermination. Aujourd’hui, la situation humanitaire à Gaza est inimaginable, des violences inouïes sont commises en Cisjordanie. Les Palestiniens sentent leur dignité bafouée.

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Les Israéliens souffrent quant à eux des actes terroristes à répétition et ont vécu le 7 octobre 2023 comme un drame national sans précédent, surtout avec la prise de centaines d’otages, et comme une véritable humiliation. Ils se sentent abandonnés par la terre entière.

Ajoutons à cela le fait que la société israélienne était déjà extrêmement divisée : plusieurs mois avant le 7 octobre, des manifestations monstres se tenaient contre le gouvernement, toutes les semaines, parfois tous les jours. Les Israéliens sont en profond désaccord sur la société qu’ils veulent. Cela s’est renforcé avec la question des otages et au gré des discours de l’extrême droite. Le tout crée un ressenti extrêmement fort, faisant qu’un discours rationnel n’est plus possible. Il y a beaucoup de désespoir des deux côtés. La guerre a cassé ce qu’il restait de confiance, notamment dans les relations entre Juifs et Arabes – en tant qu’Arabe, je le ressens au quotidien.

Une guerre aussi lourde de conséquences ne peut pas s’achever par des petites victoires ici ou là, de tel ou tel camp : il faut des décisions importantes qui permettent que tout cela ne se répète plus. On ne voit pas comment il pourrait y avoir une issue sans solution viable pour les 5 millions de Palestiniens. Il faudra des chefs courageux, réalistes et francs avec leur peuple pour aller dans ce sens. Il y en a eu par le passé. Mais aujourd’hui, y en a-t-il encore ?

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