C’est une plainte historique qui a été portée par le procureur général de Californie, Robert Bonta. Le plus peuplé et le plus riche Etat des Etats-Unis assigne officiellement la première compagnie pétrolière du pays, ExxonMobil. Il accuse l’entreprise d’avoir sciemment fait croire pendant des décennies que le recyclage des matières plastiques pouvait résoudre la crise des déchets alors que la société savait que ce n’était pas possible. ExxonMobil « a menti pour accroître ses profits au détriment de la planète et de la santé humaine », affirme le procureur Bonta.
C’est la première fois qu’un Etat américain attaque officiellement une société pétrolière sur la pollution plastique. Le sujet prend de plus en plus d’ampleur dans le monde, car à la pollution des terres et des océans par ces déchets s’ajoutent désormais un enjeu de santé publique. Les études les plus récentes ont détecté des microplastiques accumulés dans le foie, les reins, et même le cerveau. Selon la revue scientifique Annals of Global Health, émanation de l’université de Boston, chaque groupe chimique associé à un plastique est lié à au moins un problème de santé, de la fertilité aux cancers.
Production loin de décliner
Du 25 novembre au 1er décembre se tiendra à Pusan, en Corée du Sud, la cinquième réunion du comité intergouvernemental des Nations unies pour tenter de trouver un accord mondial sur la pollution plastique. Le gouvernement américain a accordé son soutien à un accord international de limitation de la production. Pas facile pour un pays qui est le deuxième producteur mondial, juste derrière la Chine. On comprend donc que ExxonMobil fasse la promotion du recyclage pour éviter de se voir imposer des limites. De la même façon qu’il milite pour la capture du CO2 afin d’éviter de ralentir sa production de pétrole.
Malgré l’inquiétude, la production est loin de décliner. Alors que le plastique représente à lui seul 50 % de toute la pétrochimie, il est donné par l’Agence internationale de l’énergie comme le principal contributeur à la hausse de la demande de pétrole. Et elle pourrait tripler d’ici à 2060, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques.
Limiter la production plastique est, en effet, un casse-tête autrement plus compliqué que la réduction de la consommation d’essence ou de gasoil. Cette découverte géniale de l’après-guerre s’est en effet immiscée partout, avec des effets spectaculaires et vertueux en matière de médecine, de conservation des aliments, de légèreté dans les transports. Tout ce qui nous entoure comprend du plastique. C’est cette versatilité qui le rend si difficile à recycler. Et le recyclage ne résout pas le problème de la santé publique. La dernière goutte de pétrole sortie du sous-sol à la fin du XXIe siècle sera probablement réservée à un plastique. Mais il sera de plus en plus sous étroite surveillance.