
Christophe Colomb (1451-1506), « un géant de la civilisation occidentale », « un titan de l’âge de l’exploration » qui nous a légué « un extraordinaire héritage de foi, de courage, de persévérance et de vertu » et dont « le voyage a transporté à travers l’Atlantique, jusqu’aux Amériques, des millénaires de sagesse, de philosophie, de raison et de culture ». Ces sentences exaltées ne sont pas issues d’un poussiéreux manuel d’histoire coloniale du début du XXe siècle, non plus que de la plume d’un idéologue de l’Espagne franquiste des années 1940. Elles figurent dans une proclamation présidentielle de Donald Trump, signée le 9 octobre à Washington, à quelques jours de la célébration du Columbus Day, qui commémore l’arrivée sur une île des Bahamas de Colomb, le 12 octobre 1492. Leur font écho les mots postés au même moment sur le réseau social X par Giorgia Meloni, la présidente du conseil italien : « Le voyage de Colomb a jeté les fondations du lien indissoluble qui unit les deux rives de l’Atlantique, l’Europe et l’Amérique, et qui représente le noyau de ce qui définit l’Occident. »
Si les outrances langagières et idéologiques de ces deux dirigeants n’ont rien pour surprendre, le choix de Colomb comme incarnation privilégiée de leurs fantasmes suprémacistes ne relève pas du hasard. Car le personnage du navigateur génois, tel que l’ont portraituré des générations d’apologistes de la « mission civilisatrice » de l’Europe, règne toujours sur nos imaginaires. Il les écrase même de sa démesure tonitruante, qu’expriment sans retenue la gouaille de Gérard Depardieu et la symphonie Conquest of Paradise, de Vangelis, dans le film 1492, de Ridley Scott (1992).
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