mercredi, mars 26

Un cap symbolique. François Bayrou passe ce dimanche 23 mars son centième jour dans le fauteuil de Premier ministre, soit un petit jour de plus que son prédécesseur Michel Barnier, renversé par l’Assemblée nationale le 13 décembre dernier.

Le maire de Pau a lui vu la menace de la censure s’éloigner début février après avoir fait passer le budget avec l’article 49.3 de la Constitution, exercice qui avait été fatal au Savoyard.

« Nous n’avions pas de budget, ni pour l’action publique, ni pour la sécurité sociale à la fin de l’année dernière. En deux mois, le Gouvernement a réussi à doter la France de ses budgets au prix d’efforts inédits sous la Ve République », s’est félicité François Bayrou dans une lettre aux parlementaires.

S’il est critiqué pour son style laborieux, le Premier ministre a su jusqu’ici trouver la méthode pour ne pas voir se former une majorité contre lui et son gouvernement.

« Bayrou, il ne fait de l’ombre à personne. Il fait sympathique, pas dangereux. Ça endort tout le monde. Mais il y a beaucoup d’habileté politique derrière », a confié un ministre sous le couvert de l’anonymat à BFMTV.

Un gouvernement « polyphonique »

Comme Michel Barnier, François Bayrou a pioché à droite et dans le bloc macroniste pour composer son gouvernement. Mais plus que son prédécesseur, il s’est entouré de poids lourds, plaçant l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin à la Justice et les anciens locataires de Matignon Élisabeth Borne et Manuel Valls à l’Éducation et aux Outre-mer. Il a aussi maintenu à son poste de ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, en course pour prendre la tête des Républicains.

François Bayrou laisse à ses ministres une grande liberté de parole, la porte-parole du gouvernement revendiquant même une « polyphonie ». Mais le concept a trouvé ses limites cette semaine, quand des dissonances ont éclaté au grand jour sur la question du port du voile islamique dans le sport.

Gérald Darmanin et Bruno Retailleau, partisans de l’interdiction des signes religieux dans les compétitions sportives votée au Sénat, s’en sont pris publiquement à la ministre des Sports Marie Barsacq, soutenue ensuite par Élisabeth Borne.

Après ces « critiques internes inacceptables », François Bayrou a convoqué une rare réunion pour recadrer ses troupes. S’il a réaffirmé la position du gouvernement sur le sujet, le Premier ministre a surtout tenu à rappeler son credo: la « solidarité gouvernementale ». Mais la discussion, loin de ramener la concorde espérée, s’est révélée « houleuse » et Bruno Retailleau a failli claquer la porte. « Du sang a coulé », a même confié un conseiller à BFMTV.

Un « conclave » dans l’impasse?

Une altercation symbole d’une machine qui s’enraye? Outre ces tensions internes, François Bayrou est confronté à des difficultés pour mettre en œuvre ses réformes, le patron de la droite Laurent Wauquiez pointant du doigt un « immobilisme ».

Le « conclave » qu’il a initié sur les retraites avec les partenaires sociaux, en particulier, subit des secousses. Après avoir accepté de remettre « en chantier » la réforme de 2023 sans « totem » ni « tabou » pour s’éviter la censure socialiste, il a finalement écarté tout retour à un âge légal de départ à 62 ans le 16 mars dernier. La CGT a aussitôt claqué la porte.

À l’Assemblée, la gronde gagne les rangs socialistes. La « question de la censure se repose à nouveau », a déclaré le patron du PS Olivier Faure au Parisien vendredi, dénonçant une « trahison de la parole donnée ».

Malgré cette épée de Damoclès, François Bayrou croit en ses chances et se projette dans l’avenir. Le mois prochain, il entend lancer une série de chantiers, de la santé à l’éducation en passant par la lutte contre la « bureaucratie ».

Dans l’opinion, le chef de gouvernement reste mal aimé. Englué dans une polémique liée à ces silences dans l’affaire d’agressions sexuelles sur mineurs de Bétharram, François Bayrou a vu sa cote de popularité chuter de 11 points dans le dernier sondage Ifop pour le JDD, plafonnant à 27% d’opinions favorables.

Article original publié sur BFMTV.com

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