Le ministre de l’économie, Antoine Armand, a de nouveau appelé « chacun à ses responsabilités » samedi 30 novembre, pour tenter de sortir le gouvernement d’une profonde crise politique sur son projet de budget.
Minoritaire, l’exécutif multiplie les compromis pour tenter d’échapper à une motion de censure qui, si le gouvernement était renversé, retarderait l’adoption d’un budget de l’Etat. La mise au vote du budget de la Sécurité sociale à l’Assemblée nationale, lundi 2 décembre, pourrait servir de déclencheur au dépôt d’une telle motion, si le premier ministre, Michel Barnier, décide d’activer l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le texte sans risquer son rejet par les députés.
Une motion de censure déposée lundi par l’opposition serait examinée au plus tôt mercredi. Si la gauche et le Rassemblement national unissent leurs voix, le gouvernement serait renversé. Ce serait la première fois depuis la chute du gouvernement de Georges Pompidou en 1962.
« L’absence de budget, l’instabilité politique entraînerait une augmentation soudaine et substantielle des coûts de financement de la dette française », a fait valoir le ministre lors d’un point presse au lendemain du maintien de la note de la France par l’agence S&P. « Dans ce moment crucial, au-delà des clivages partisans, dans l’intérêt général, notre pays a besoin d’un budget et j’appelle chacun à ses responsabilités », a-t-il plaidé.
Samedi matin, le député Jean-Philippe Tanguy (Rassemblement national), chargé des questions économiques au sein du parti d’extrême droite, a déclaré aux Echos : « Nous attendons de voir le projet de budget de la Sécurité sociale lundi pour en tirer les conséquences. Si le texte n’a pas évolué et que le gouvernement décide d’un 49.3, nous voterons la censure ». Même si le budget de la « Sécu » a fait l’objet d’un accord entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire mercredi, le gouvernement peut encore modifier son texte jusqu’au dernier moment pour satisfaire aux exigences des oppositions.
« Lignes rouges » fixées par le RN
« Nos lignes rouges sont les mêmes depuis le début de la discussion budgétaire et nous ne reculerons sur aucune de nos demandes. Hors de question de transiger sur la revalorisation de toutes les retraites au 1er janvier », a par ailleurs commenté, cette fois-ci sur le projet de loi de finances discuté au Sénat en parallèle de celui de la Sécurité sociale, Jean-Philippe Tanguy.
Après un recul sur les retraites ou les cotisations patronales, le gouvernement a accepté de ne pas augmenter, dans le projet de loi de finances, une taxe sur l’électricité au-delà de son niveau d’avant le bouclier tarifaire afin de satisfaire le Rassemblement national, qui menace de s’allier à la gauche pour le renverser.
Malgré tout, la cheffe de file du parti, Marine Le Pen, ne semblait pas disposée à renoncer à une censure du gouvernement. Vendredi, la députée du Pas-de-Calais a exigé des réponses avant lundi, date après laquelle le gouvernement ne pourra plus amender son projet de budget de la Sécurité sociale.
Les « lignes rouges » formulées par le parti d’extrême droite comprennent donc, par ailleurs, l’annulation de la désindexation partielle des retraites sur l’inflation – représentant trois milliards d’économies – au 1er janvier et du déremboursement des médicaments. « Au fond, on peut se poser une question quand celles et ceux qui avaient certaines lignes rouges en annoncent d’autres au fur et à mesure », a commenté Antoine Armand samedi. « Nous avons encore quelques jours (…) de débat démocratique. Que ce débat se tienne avec, au centre du jeu, le fait de ramener la France à un déficit sous les 5 %, bien loin des postures », a encore appelé le ministre.
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Dans le même temps, le Sénat poursuivait, samedi, l’examen du volet « recettes » du projet de loi de finances, qu’il devrait adopter, dimanche, après l’avoir en partie remanié. Après une semaine de débats scrutés comme rarement au Palais du Luxembourg, les sénateurs ont globalement approuvé l’essentiel des mesures phares du gouvernement, en quête de 60 milliards d’euros d’économies pour ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025, contre 6,1 % en 2024. Les Sénateurs basculeront, dès lundi, sur l’examen du volet « dépenses » du budget de l’Etat.