samedi, mai 18
Un campement occupé par des manifestants en soutien à la Palestine dans l’enceinte de l’université Columbia, à New York. le 22 avril 2024.

Milène Klein s’apprêtait à fêter Pessah, la Pâque juive, en famille, lundi 22 avril. Mais cela ne l’a pas empêchée de poursuivre sa mobilisation. Un drapeau palestinien dessiné sur la joue gauche, le mot « juive » écrit sur la joue droite, cette étudiante en philosophie et littératures comparées de 21 ans fait partie des nombreux étudiants juifs de l’université Columbia qui soutiennent le mouvement contre la guerre à Gaza. Le campus new-yorkais, qui compte une forte communauté d’étudiants juifs (5 000 sur 36 000), se déchire depuis des mois sur la guerre entre Israël et le Hamas.

Les tensions sont devenues telles que le lieu s’est transformé en camp retranché, avec filtrage des étudiants par la police et une suspension des cours décidée en catastrophe lundi matin, avant des arrestations d’étudiants propalestiniens dans la soirée.

« C’est comme s’il y avait eu un coup d’Etat militaire sur le campus. On ne voit plus nos dirigeants, ils nous envoient des mails pour nous dire que ce qui se passe est terrible. Il y a des flics partout sur le campus. Mais beaucoup d’étudiants se disent que maintenant, c’est notre campus », confie Milène Klein, qui estime vouloir saisir la chance de se faire entendre. « C’est notre responsabilité en tant que juifs de nous lever et de dire que ce qui se passe [à Gaza] est un génocide », estime-t-elle, accusant « des sionistes d’utiliser ce moment pour pousser leur agenda et menacer les étudiants palestiniens et arabes du campus ».

Mais, au cœur de ces tensions, les étudiants juifs aussi se sentent en danger, agressés verbalement, parfois menacés physiquement, entendant de leurs dortoirs placés à côté de la place centrale du campus des slogans anti-israéliens, voire antisémites. L’affaire a pris un tour politique, avec un campus et un corps professoral engagés à gauche, une communauté juive globalement inquiète et des républicains ravis d’en découdre avec les universités progressistes et de museler toute critique d’Israël.

Entre le grotesque et le maccarthysme

Le président américain lui-même est intervenu, lundi, sur le sujet, condamnant les « manifestations antisémites » sur les campus, tout comme « ceux qui ne comprennent pas ce qui se passe avec les Palestiniens ». A Yale, une soixantaine d’étudiants défendant la cause palestinienne ont été arrêtés. A travers le pays, d’autres campus se mobilisent.

La crise à Columbia s’est cristallisée mercredi 17 avril. Ce jour-là, la présidente de l’université, Nemat Shafik, 61 ans, une économiste d’origine égyptienne en poste depuis l’été 2023, est auditionnée par une commission du Congrès, celle-là même qui a conduit, en décembre 2023, à la chute des présidentes de Harvard et Pennsylvania. Interrogées par l’élue trumpiste Elise Stefanik pour savoir si l’appel au génocide des juifs violait le règlement intérieur de leur université, elles avaient répondu que cela « dépendait du contexte ». Nemat Shafik est bien décidée à ne pas commettre l’erreur de ses collègues. « Oui, cela le viole », répond-elle à la question.

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