dimanche, mai 19
Le Parlement européen, à Bruxelles, le 11 avril 2024.

Faustine Bas-Defossez s’occupe des questions liées à la nature, à la santé et à l’environnement au sein du Bureau européen de l’environnement, une fédération réunissant près de 200 ONG. Lors de la dernière mandature du Parlement européen, elle a pu constater le travail des lobbys industriels pour affaiblir le pacte vert européen.

Depuis les dernières élections européennes de 2019, l’activité des lobbys industriels a-t-elle été plus importante que d’habitude ?

Oui, leur activité a été intense car ils ont senti l’importance du moment. Le pacte vert est un projet ambitieux et systémique censé mettre l’Union européenne sur la voie nécessaire de la neutralité carbone en 2050. Et il nécessite des mesures dans tous les secteurs. Avec l’irruption du Covid-19, certains lobbys, comme Business Europe, qui rassemble beaucoup d’industriels, ont tenté de torpiller l’ensemble du pacte en disant que la priorité allait maintenant être de soutenir les entreprises pendant des années. Cela a échoué et la crise a, au contraire, permis de verdir les économies avec les différents plans de relance.

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Beaucoup d’entreprises étaient d’ailleurs sur cette ligne, car elles savent les risques économiques que leur font courir les problèmes climatiques et environnementaux à long terme. Il y a eu une deuxième offensive plus agressive contre le pacte vert après le déclenchement de la guerre en Ukraine, en 2022, là aussi en défendant l’idée que l’urgence était ailleurs, puis des détricotages après la crise agricole et la perspective des prochaines élections européennes, du 6 au 9 juin.

Sur quels textes l’action des lobbys a semblé être la plus efficace ?

Le volet climat du pacte vert, le « Fit for 55 », est passé sans trop de problèmes. La dynamique des élections de 2019, qui s’étaient déroulées au milieu des grandes marches climat des jeunes, et le profil d’Ursula von der Leyen [la présidente de la Commission européenne] ont porté ce sujet. Après, quand on est entré dans des mesures sectorielles ou sur des thématiques précises, les choses se sont compliquées, avec parfois des avancées tuées dans l’œuf.

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La révision du règlement Reach [l’évaluation des risques des substances chimiques] n’a même pas été présentée après un intense travail de lobbying des industriels de la chimie allemands. Idem pour la loi-cadre sur les systèmes alimentaires durables, qui aurait aussi été bénéfique aux agriculteurs, notamment sur la question des prix… Sur les emballages en plastique, sur la stratégie globale « De la ferme à la fourchette », sur le texte de restauration de la nature, les lobbys se sont déployés en entrant en contact avec les députés de l’extrême droite, du Parti populaire européen (PPE, centre et droite) et d’autres groupes. Plus on se rapprochait de la prochaine élection, plus d’autres événements prenaient de l’importance, plus les arguments des lobbys sur la nécessité d’un statu quo se répandaient au sein de la Commission ou du Parlement.

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