L’homme, la cinquantaine un peu replète, marche tranquillement, en jeans et t-shirt, cheveux courts et lunettes d’étudiant appliqué, dans la rue Lehi, à Tel-Aviv, dimanche 18 août, un sac à dos bleu sur les épaules. La soirée est à la fois calme et inquiète, dans l’attente du résultat des négociations qui doivent aboutir à un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas palestinien, mais aussi d’éventuelles représailles de l’Iran et du Hezbollah, après les assassinats ciblés commis par l’Etat hébreu à Téhéran et à Beyrouth, fin juillet – dont celui d’Ismaïl Haniyeh, le leader du Hamas, originaire de Gaza.
Soudain, à la hauteur du numéro 97 de la rue Lehi, une puissante explosion pulvérise le porteur du sac et résonne dans la rue, blessant légèrement un passant. Un attentat ou un règlement de compte ? « On peut considérer qu’il s’agit d’une attaque terroriste, avec la détonation d’un puissant engin explosif », estiment la police israélienne et le Shin Bet, le service de renseignement intérieur. Plus tard, le Hamas et le Jihad islamique, dans un communiqué conjoint, revendiquent « l’attaque-suicide de dimanche soir à Tel-Aviv », même si l’assaillant semble avoir raté son coup, la charge explosant dans une rue déserte.
Mais ce communiqué est assorti d’une menace : « Les attentats-suicides à l’intérieur occupé [Israël] reviendront sur le devant de la scène tant que dureront les massacres de l’occupant [israélien], les opérations de transfert forcé de civils et la politique des assassinats. » Autrement dit : les attaques de ce type continueront tant que la guerre à Gaza durera, et que le ciblage systématique des cadres des groupes armés palestiniens, dans l’enclave palestinienne ou ailleurs, se poursuivra.
A propos de l’explosion de Tel-Aviv, la police israélienne soupçonne qu’une synagogue voisine était la cible de l’assaillant. Malgré l’absence d’alertes spécifiques concernant de futures attaques, la présence policière a été renforcée dans la ville. A ce stade de l’enquête, de nombreux détails manquent, notamment sur l’identité du porteur des explosifs, sans antécédents criminels ou terroristes connus ; il n’a pas laissé de témoignage sur les raisons de son geste, contrairement au modus operandi habituel. Un haut responsable de la police a déclaré au média israélien Haaretz que l’engin « ne ressemblait à rien de ce que nous avons vu depuis des années dans notre district. Cela nous met dans un état d’esprit différent. »
Avec cette attaque ratée resurgit le spectre des nombreuses attaques kamikazes de la deuxième Intifada, au début des années 2000. Lors de cette décennie, près de la moitié des quelque 1 200 personnes tuées ont été victimes d’attentats-suicides, selon le chercheur Yoram Schweitzer, responsable du terrorisme et des conflits de basse intensité à l’Institut pour les études de sécurité nationale, un groupe de réflexion israélien.
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