samedi, mai 18
Des visiteurs passent devant les statues du leader nationaliste Tchang Kaï-chek au Cihu Memorial Sculpture Park, à Taoyuan, le 27 mars 2024.

Faut-il éliminer du domaine public taïwanais toute trace du « généralissime » Tchang Kaï-chek ? C’est en tout cas ce qu’a réclamé, lundi 22 avril, au Yuan législatif (le Parlement taïwanais), Huang Jie, 31 ans, jeune députée du Parti démocrate progressiste (DPP), impatiente de voir disparaître les dernières statues de l’ancien dictateur, qui hantent encore quelques rues et parcs, mais surtout, semble-t-il, les casernes de l’île, près de cinquante ans après sa mort, en 1975.

Citée par le quotidien hongkongais South China Morning Post, Huang Jie a rappelé que le gouvernement avait offert des subventions à hauteur de 100 000 NTdollar (environ 2 900 euros) pour faciliter l’enlèvement des 934 dernières statues répertoriées. Pourtant, malgré ces incitations, seules 165 d’entre elles ont été enlevées. Le ministre de la défense, Chiu Kuo-cheng, avait donné l’explication la semaine dernière en rappelant que Tchang Kaï-chek est une figure hautement symbolique pour l’armée taïwanaise, laquelle semble soucieuse, justement, de bien conserver les statues encore en sa possession. Car Tchang Kaï-chek a contribué à fonder l’Académie militaire de Whampoa, à Guangzhou, en 1924, dont l’armée taïwanaise, qui fêtera son centenaire le 16 juin, est la continuité directe.

« Avec les menaces quotidiennes que l’armée de libération populaire [chinoise] fait peser sur Taïwan, ce n’est pas très sage de saper le moral de l’armée en déshonorant Tchang Kaï-chek, juge le professeur Alexandre Huang, directeur des relations internationales du parti nationaliste Kouomintang. Pour l’immense majorité des Taïwanais, Tchang Kaï-chek n’a plus aucun impact sur leur vie quotidienne et même si son legs est mitigé, s’attaquer à ses dernières statues est contre-productif et risque de troubler l’harmonie sociale inutilement. »

Lire notre archive (2020) : Article réservé à nos abonnés Taïwan déterre les crimes de la dictature de Tchang Kaï-chek

« Terreur blanche »

Car Tchang Kaï-chek, ancien président de la République de Chine (nom officiel de Taïwan) fut d’abord le chef des forces nationalistes chinoises, le Kouomintang, et donc un ancien dirigeant, de 1928 à 1949, de la République de Chine quand le titre désignait l’ensemble de la Chine continentale. Et s’il finit sa vie à Taïwan, qu’il dirigea d’une main de fer après s’y être replié avec ses troupes en 1949, laissant la révolution communiste prendre le contrôle du reste de la Chine, il avait toutefois longtemps gardé l’espoir, de reprendre un jour la grande Chine à Mao Zedong, qu’il précéda d’un an dans la tombe.

Depuis la démocratisation de Taïwan, à partir des années 1990, et l’arrivée au pouvoir du DPP, dont le manifeste revendique l’indépendance mais qui se dit aujourd’hui partisan du statu quo, les programmes éducatifs ainsi que de nombreuses initiatives culturelles ont mis en lumière les périodes les plus sombres de l’héritage de Tchang Kaï-chek, notamment la période dite de la « terreur blanche », au cours de laquelle entre 20 000 et 30 000 opposants ont été exécutés.

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