lundi, septembre 23

Le commissaire François Thierry, 56 ans, comparaît à Lyon, à partir de lundi 23 septembre, devant la cour criminelle du Rhône, pour « faux en écriture publique » et « destruction de preuves », qualifications criminelles en raison de sa qualité de dépositaire de l’autorité publique. L’ancien chef de l’ex-Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS) est suspecté d’avoir organisé, en 2012, une fausse garde à vue en faveur de son informateur et d’avoir détruit les documents et les téléphones en rapport avec cet épisode procédural fictif.

En avril 2012, le patron de l’OCRTIS obtient, des magistrats, le feu vert pour l’extraction, de sa prison de Nancy, de Sofiane Hambli. Considéré comme un des plus gros importateurs de cannabis en France, Hambli purge alors une peine de treize ans de détention pour trafic de stupéfiants. Il est aussi devenu l’informateur privilégié du commissaire Thierry, ce qui lui a permis de développer un dispositif complètement inédit, au sein de l’Office central des stups, nommé Myrmidon, qui consistait à surveiller des importations massives de stupéfiants pour interpeller les trafiquants importants.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Pourquoi le commissaire Thierry, ex-patron des « stups », est renvoyé seul aux assises pour une fausse garde à vue

Le transfert d’Hambli est officiellement justifié par une garde à vue, contrôlée par la section C2 du parquet de Paris, juridiction interrégionale spécialisée, chargée de la grande criminalité. Au moment même où a lieu cette garde à vue, à Nanterre, l’OCRTIS pilote une livraison surveillée de cannabis en Espagne. Six tonnes conditionnées en dizaines de ballots sont débarquées d’une plage d’Estepona, transférées dans une villa spécialement louée et gardée par Hubert Avoine, un autre informateur du commissaire, inscrit au bureau central des sources.

Avoine dénonce cet épisode espagnol à la justice lorsqu’éclate l’affaire Hambli-Thierry, en octobre 2015, avec la découverte par les douanes de sept tonnes de cannabis, boulevard Exelmans, à Paris, importés depuis l’Espagne, dans des circonstances similaires. Comme il l’a raconté dans le livre coécrit avec le journaliste de Libération Emmanuel Fansten (L’Infiltré, Robert Laffont, 2017), sorti avant son décès, en 2018, Hubert Avoine accuse François Thierry d’avoir organisé la logistique bien au-delà des nécessités de service. Le volet de la fausse garde à vue est instruit à Lyon, parallèle au dossier principal du boulevard Exelmans, ouvert à Paris, puis dépaysé à Bordeaux.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Le parquet de Bordeaux requiert un non-lieu pour l’ancien chef de la lutte antistupéfiants

« Légèreté coupable » d’une magistrate

Le juge lyonnais a établi que l’extraction de Sofiane Hambli était directement liée à l’opération de la plage d’Estepona. En résumé : depuis sa chambre d’hôtel, l’informateur se faisait passer, au téléphone, pour le commanditaire, auprès des fournisseurs marocains. Les policiers suivaient le transfert de la drogue, avec pour objectif d’identifier la chaîne des acheteurs. La justice estime que seulement 1,9 tonne a été saisie, sur les 6 tonnes débarquées en Espagne et remontées en France. Une « faille majeure » dans le dispositif Myrmidon, dénonce le juge Michel Noyer, dans son ordonnance de renvoi.

Il vous reste 40.68% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version