jeudi, juillet 4
Julie Saury (batterie) et Rhoda Scott (orgue Hammond), lors du festival Jazz in Aiacciu, au Théâtre de verdure du Casone, à Ajaccio, le 28 juin 2024.

Programmé au théâtre de verdure du Casone, Jazz in Aiacciu se signale par son charme, son accueil, le soin des détails et la constance de sa programmation. Un modèle de diplomatie, de parité et d’équilibre. Quatre soirées (du 26 au 29 juin) pour faire le tour de la question : les nouveaux promus dont on parle, le sax ténor Léon Phal ; la saxophoniste londonienne Camilla George, dansant sur un fil entre afrobeat et hip-hop ; les vibrants Cubains en tournée (El Comité) ; la reine des scènes, Youn Sun Nah, en duo avec le pianiste et orchestrateur, Bojan Z ; final en beauté avec Goran Bregovic, le plus connu du genre balkan, illustré par les films d’Emir Kusturica. Première partie, c’est ici une tradition, les Chjami Aghjalesi, polyphonie (corse).

Deux demi-soirées condensent cette programmation de qualité : Astral de la compositrice Leïla Olivesi ; puis Madame Rhoda Scott et son Lady Quartet. Perfection des orchestrations, transgression des genres et des âges, plaisir des rythmes et des voix… Et, mine de rien, ce rappel sans effet de mode : le jazz a son histoire, et ces deux concerts la mettent en scène.

Leïla Olivesi, née au Moulin d’Andé en Normandie, a joué avec toute la scène de son âge (du fidèle Jean-Charles Richard à Jeanne Added, en passant par Magic Malik et Leon Parker). D’un père mauritanien et d’une mère corse d’origine marocaine, elle est la petite-fille d’une grand-mère premier violon au Conservatoire de Paris. A la tête de son octet, elle présente Astral, la version live d’un album très fêté (2022), soigneusement rodée en deux ans de scène. Huit musiciens qui ont des carrières personnelles, Baptiste Herbin (alto, flûte), Adrien Sanchez (ténor), Jean-Charles Richard (baryton et soprano), Quentin Ghomari (trompette et bugle), Manu Codjia (guitare), Yoni Zelnik (contrebasse), Donald Kontomanou (batterie).

Elégance raffinée

Se demander simplement : d’où vient l’autorité consentie de Leïla Olivesi ? Que représentent les séances de mise au point, d’ajustement, qui préludent au disque et au concert ? Les hommages à Wayne Shorter (Wayne Left Town), les poèmes insérés (Draconis), tout suppose une écriture d’une subtilité, d’une élégance raffinée et aussi d’une assez étonnante audace.

Lire l’article (2023) : Leïla Olivesi désignée meilleure musicienne française de l’année par l’Académie du jazz

On entend l’amour des grands arrangeurs (Billy Strayhorn, Gil Evans, etc.), soit, mais peu importe : on entend la marque bien rare d’une jeune femme qui se consacre à la volonté d’écrire et de renouveler son art… Une jeune femme suffisamment convaincante pour embarquer huit voix, huit timbres, huit tessitures, huit personnalités dans son voyage. Leïla Olivesi écrit pour chaque timbre, chaque voix, elle les a en tête, et leur rend leur liberté en scène. Elle tient son rang dans la lignée des grandes cheffes, Mary Lou Williams, Carla Bley, Maria Schneider…

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