Au sein des institutions européennes, la nomination de Michel Barnier au poste de premier ministre, jeudi 5 septembre, a d’abord et avant tout été accueillie avec soulagement. Le Savoyard, deux fois commissaires (à la politique régionale, de 1999 à 2004, puis au marché intérieur et aux services financiers, de 2010 à 2014) et artisan de l’accord de décembre 2020 qui régit, depuis, les relations post-Brexit entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, connaît comme personne la machine communautaire, où il s’est constitué un réseau hors pair.
Longtemps mal-aimé de ses amis politiques français, Michel Barnier a toujours pu se rassurer à Bruxelles, où l’on apprécie ses qualités très européennes, tellement loin de l’arrogance hexagonale. Dans les creux de sa carrière, d’ailleurs, il a toujours pu compter sur l’Europe pour l’aider. Ainsi, en février 2015, après avoir essuyé, fin 2014, une défaite dans la course à la tête de la Commission contre le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, puis s’être vu refuser par l’UMP une investiture pour les élections régionales à venir en France, il avait été nommé conseiller défense du président de l’exécutif européen.
Peu charismatique, peu porté sur la technicité des dossiers, un brin laborieux, le « montagnard », comme il aime à se dépeindre, possède ce sens du compromis, peu prisé par la Ve République et si important quand il faut se mettre d’accord à vingt-sept, puis avec le Parlement européen. Quand il négocie, il ne néglige personne. Lors des discussions post-Brexit entre Bruxelles et Londres, qui ont duré quatre ans, il a toujours traité sur un pied d’égalité les petits et les grands pays, il a parcouru sans relâche toutes les capitales. Il a rendu compte des avancées de son travail aux chefs d’Etat, aux eurodéputés, aux élus nationaux, ou encore aux partenaires sociaux avec la régularité d’un métronome.
« Il est très germain, ou Benelux »
« Barnier est très démocratie parlementaire, de ce point de vue, il est très germain, ou Benelux. Ce n’est pas courant pour un Français, expliquait à l’époque au Monde l’eurodéputé belge (Verts) Philippe Lamberts, qui a depuis quitté le Parlement européen. Il a compris qu’en Europe, il ne faut jamais écraser ton partenaire de négociation car, demain, il peut être ton allié. » Cette manière de faire ne suscite pas toujours l’admiration – la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen d’ailleurs l’a traité avec beaucoup de mépris quand il était « Monsieur Brexit » – mais elle a fait ses preuves en Europe. « S’il fait avec l’Assemblée nationale comme il a fait avec le Brexit, il va réussir », commente aujourd’hui un haut fonctionnaire européen.
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